Le parcours d’installation des étudiants internationaux nouvellement arrivés dans la ville est rempli d’obstacles. Ces étudiants viennent de plusieurs horizons, sans repères et avec une culture différente. Dès le départ, ils doivent alors se faire bien accompagner dans leur nouvelle vie pour une bonne adaptation. Mais tout ne se passe pas tout le temps normalement.
En tant qu’ancien étudiant international, j’aimerais parler de certaines difficultés que vivent ces étudiants.
Difficultés relationnelles
À leur arrivée, et dans le souci de découvrir les codes sociaux locaux, plusieurs d’entre eux essaient de sortir de leur zone de confort en allant vers les autres, en posant des questions et en essayant de tisser des liens d’amitié.
Il ne faut pas oublier que quand on est nouvel arrivant, pour faire de l’épicerie, faire la demande d’un document administratif, se soigner, trouver un logement, se divertir, découvrir la ville, trouver de l’emploi et plus encore, ça prend des amis, des personnes-ressources, des connaissances.
Ce qui est dommage, c’est que plusieurs d’entre eux font face à de la méfiance, à l’ignorance ou souvent au rejet. Cela peut mener à l’isolement et avoir pour conséquence la dépression. Plusieurs d’entre eux vivent cela en gardant le silence.
Difficultés financières
Logement : Le logement est l’un des grands problèmes pour ces personnes, compte tenu du cout, mais aussi de l’accessibilité. Le prix de location d’une chambre dans les campus universitaires de la ville est assez élevé quand on le compare avec celui des résidences universitaires au Québec.
Par exemple, dans la plupart des universités québécoises, le prix de location par mois d’une grande chambre équipée est d’approximativement 470 $ par mois. Pourtant, le prix de la même chambre dans plusieurs universités ontariennes, y compris celles de Sudbury, est de plus de 1000 $ par mois. C’est une différence de prix assez conséquente.
Quand ces étudiants veulent avoir des logements décents à l’extérieur du campus, ils se heurtent souvent à de la discrimination et aux prix exorbitants qu’on leur propose à cause de leur statut. Et donc, ils ne parviennent pas à en obtenir facilement.
Emploi : Les étudiants internationaux viennent avec du bagage intellectuel et professionnel, mais se voient refuser certains emplois. On reconnait difficilement leurs diplômes ou leurs expériences dans le milieu du travail. On ne leur donne pas la chance de faire valoir leur savoir-faire. Pour les francophones, l’anglais intermédiaire leur est souvent exigé pour des emplois qui nécessitent en pratique un Anglais de base. Ils trouvent donc difficilement du travail et ne dépendent financièrement que de leurs parents. Ils ont alors une petite marge financière, ce qui réduit leur qualité de vie.
Scolarité : Les frais de scolarité sont très élevés pour les étudiants internationaux. Par exemple, dans plusieurs programmes d’étude proposés par les universités ontariennes, y compris celles de Sudbury, les frais de scolarité pour les étudiants internationaux sont fixés à plus de 25 000 $, avec très peu de bourses qui leur sont destinées.
Au Québec, les universités ont un système de bourses d’études pour les étudiants internationaux qui leur permet de réduire le cout de la scolarité. Il y a plusieurs bourses d’exemption et d’autres types pour celles et ceux qui sont en difficulté financière ou/et qui ont d’excellents résultats académiques. En Ontario, ce système de bourse est très limité.
Difficultés de vie culturelle
Compte tenu du stress lié à leur installation et leur adaptation, ils cherchent le moyen de se divertir, de rencontrer du monde et de déstresser avec des activités interculturelles dans la ville. Bien que celles-ci soient diversifiées, elles ne répondent pas toujours aux attentes des étudiants internationaux. Ils ne se sentent pas forcément représentés dans ces activités.
Nous devons retenir que ces étudiants internationaux sont dans une lancée de découverte de culture, mais aussi de brassage culturel. C’est donc dire que ce serait bénéfique pour les organismes culturels de Sudbury de diversifier leur programmation annuelle en prenant en compte les suggestions des étudiants internationaux. Cela permettra de l’enrichir, ce qui créera de l’engouement autour de celle-ci.
Les fêtes de fin d’année pour les étudiants internationaux
À l’approche des fêtes de fin d’année, plusieurs étudiants ne savent pas où tourner la tête. Ils restent au campus universitaire ou dans leur logement à l’extérieur du campus, dans la solitude très souvent, et ne les célèbrent pas. Il y a un lien étroit à faire entre cette situation et les difficultés relationnelles qu’ils ont.
J’aimerais parler de mon expérience personnelle. Je suis arrivé à Sudbury le 2 décembre 2016 et je résidais sur le campus de l’Université Laurentienne. Je ne savais pas où aller ou quoi faire pour les fêtes de fin d’année. J’étais assez sociable, donc dans les discussions avec mon colocataire Daniel, il a pris connaissance de ma situation. Il m’a donc proposé de passer les fêtes avec sa famille. C’est ainsi qu’on a appris à mieux se connaitre et j’ai échappé à la solitude pendant cette période, qui est censée être joyeuse pour tout le monde.
Cet exemple souligne que si Daniel avait été réticent envers moi, j’allais passer les fêtes tout seul. J’invite la population locale et estudiantine de la ville à être solidaire et sympathique envers ces personnes et à les aider du mieux possible. Je pense que les associations universitaires, estudiantines ou autres devraient penser à eux en ces temps de Fête. Tout le monde ne sait pas forcément comment, où et avec qui passer les fêtes. La création d’activités pendant le temps des Fêtes devrait être un impératif pour ces associations. Il en va de la santé mentale de ces étudiants.
Nous sommes la solution
Voici donc certains des problèmes que vivent beaucoup d’étudiants internationaux. Je vous partage ces expériences dans l’optique de véhiculer l’information aux habitants, aux employeurs, aux organismes culturels, aux institutions académiques et, surtout, aux responsables des trois niveaux de gouvernement qui doivent agir concrètement pour résoudre ces problèmes.
Nous sommes tous concernés dans le processus d’accueil des étudiants internationaux. Il est de notre responsabilité à tous d’être ouverts d’esprit, d’être solidaires et d’accueillir ces personnes dans le respect, la bienveillance, mais aussi avec amour et sympathie. L’accueil qu’on reçoit quand on déménage dans une ville est très significatif et représente l’un des facteurs qui déterminent le niveau d’envie de s’y établir ou malheureusement d’y vivre temporairement. Nous devons créer un environnement propice à leur épanouissement, à l’amélioration de leurs conditions de vie afin qu’ils aient l’envie de s’établir définitivement dans la ville.
Ahmed Saba est agent de liaison culturelle pour le Projet Communauté francophone accueillante du Centre de santé communautaire du Grand Sudbury. Financé par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.