Née à Val Gagné, dans le Nord-est de l’Ontario, Julie s’est déplacée à Sudbury en 1981 pour obtenir son baccalauréat ès arts à l’Université Laurentienne dans le domaine des sciences du langage.
Détentrice d’un B.A., elle s’est inscrite à la Faculté d’éducation de l’Université de Toronto pour y obtenir une maîtrise avec équivalence en Arts, plus spécifiquement en linguistique. Elle s’est ensuite déplacée à la Faculté d’éducation de l’Université d’Ottawa, afin de poursuivre des études doctorales en linguistique et sciences du langage.
Toutefois, à cause du décès de son superviseur de thèse, elle a obtenu un Ph.D. en 2003, dans le domaine de nouvelles technologies. «En tant que franco-ontarienne, je me suis intéressée à la question identitaire à l’époque où on n’en parlait pas tellement. Je me suis toujours intéressée aux questions langagières, linguistiques et identitaires dans les écoles et les conseils scolaires du Nord-ouest et du Nord-est de l’Ontario», a-t-elle admis au Voyageur.
Pendant ses études doctorales, elle a travaillé pendant huit ans pour le Centre de recherche en éducation du Nouvel-Ontario et a été chargée de cours à l’Université Laurentienne de 1987 à 2004, lorsqu’elle a obtenu un poste de professeure en Études françaises et ce jusqu’en 2021, lorsque l’institution a procédé à la fermeture de nombreux programmes en français ainsi qu’au limogeage de quelque 200 professeur.e.s et employé.e.s.
«Il y a espoir pour la langue française»
Ses études sur la langue française dans le Nord de l’Ontario la mènent à conclure qu’elle a bon espoir quant à l’état de cette langue, surtout dans le Nord-est de la province, comparativement au Sud-ouest et au Nord-ouest parce qu’il s’y trouve une plus grande proportion de francophones.
«Souvent les gens vont passer un jugement en fonction de ce qu’ils croient ne fonctionne pas au niveau de la langue française, alors que moi je pose plutôt un regard sur l’évolution de la langue. Pour moi, la langue française en Ontario, elle est maintenue et lorsqu’elle est maintenue, elle est très riche», déclare-t-elle.
Selon Julie, le fait de connaître l’anglais ou d’être en mesure de le parler ne signifie pas, contrairement à ce que la pensée populaire peut croire, que si on fait l’apprentissage d’une deuxième langue, on perd automatiquement la première.
«À Sudbury, on peut connaître l’anglais et dans la plupart des cas pouvoir s’exprimer très bien en français. Lorsque je suis arrivée à Sudbury, et que je parlais le français à mes amis dans la rue, souvent on me reprochait de le faire et j’ai compris que c’étaient souvent les francophones qui me faisaient ces reproches. Le français n’était pas visible autant qu’il peut l’être aujourd’hui; donc il y a eu des changements», , dit-elle.
Elle a fait une enquête au cours des deux dernières années au sujet des marqueurs que les gens utilisent, soit des mots comme «et pis», des mots de transition qui viennent colorer le parler, pour pouvoir poursuivre la narration. Comme le mot «so» en anglais, dont le parallèle en français est le «donc».
«J’ai trouvé que oui le ‘’so’’ est en augmentation, mais ce qu’on n’a pas remarqué c’est que le mot ‘’donc’’ occupe plus de place que le ‘’so’’. C’est ce genre d’usage de vocabulaire que j’étudie. Si on regarde seulement l’usage de l’anglais ça peut sembler aberrant, mais si on regarde l’usage de l’anglais et du français, ça peut brosser tout un autre portrait», fait-elle remarquer.
Elle poursuit en disant : «On s’est contenté de démontrer que l’usage de l’anglais augmentait et les gens ont conclu à l’assimilation. Je dis qu’il y a une nuance à faire. C’est pas parce que l’usage de l’anglais augmente que automatiquement la qualité ou l’usage du français diminue. C’est dans cet ordre là que j’examine la langue aujourd’hui».
Les défis autour de la condition de la femme
Dans un autre ordre d’idées, soit la condition de la femme aujourd’hui, Julie croit qu’en général, elle s’est améliorée, mais qu’il reste encore beaucoup de défis à surmonter. «Ce qu’on vit comme femme, tout ça a évolué dans le temps.
La femme occupe plus de place dans la société. Les femmes sont plus éduquées et ce à deux niveaux : premièrement celui de leurs connaissances et deuxièmement au niveau de leurs droits. La femme s’affirme plus et occupe sa place. Ce n’est plus il y a 40 ans. Mais je le répète, de grands défis demeurent encore».
Au niveau de son engagement dans les milieux universitaire et communautaire, elle a été directrice des Études françaises à la Laurentienne, co-organisatrice des colloques Langue et territoire avec feu Ali Reguigui.
Elle coordonne la 7e édition avec le Centre de recherche sur les francophonies canadiennes qui aura lieu en juin. Au niveau communautaire, elle a fait du bénévolat au Centre Victoria, au Carrefour francophone et a été membre du conseil d’administration du Centre international d’études francophones. Elle est présentement membre du conseil de direction de la Société historique du Nouvel-Ontario et du Salon du livre du Grand Sudbury.
«J’avais diminué mon engagement dans la communauté pendant que j’étais en poste à la Laurentienne. Ça me manquait énormément. Depuis mon départ forcé de l’université, j’ai repris contact avec des organismes communautaires et ça me plaît beaucoup», conclut-elle.