Des règlements municipaux dans la plupart des villes fusionnées en 2001 — Rayside-Balfour, Vallée-Est, Sudbury ainsi que l’ancienne Municipalité régionale — consacraient les services en français. Mais le récent rapport sur le bilinguisme municipal commandé par l’ACFO du grand Sudbury* révèle que les bottines n’ont jamais suivi les babines et que la situation est encore pire depuis la fusion.
Dans son rapport intitulé Progrès, résistance et opportunités, l’historien et chercheur Serge Dupuis retrace l’histoire des services en français offerts dans la région de Sudbury depuis l’engouement pour le bilinguisme des années 1960-1970 jusqu’à aujourd’hui. Une chose est claire : même dans les années 1960-1970, lorsque les premiers règlements municipaux sont adoptés, l’appui à ces services a toujours été mitigé. Et cet appui est aujourd’hui souvent bafoué par certains dirigeants anglophones du Grand Sudbury.
Le règlement municipal qui régit les services en français du Grand Sudbury a lui-même été amoindri. Par exemple, les règlements municipaux de Rayside-Balfour et de Vallée-Est prévoyaient que plusieurs chefs de département devaient être bilingues. Or cette exigence disparait dans la mouture adoptée par le Grand Sudbury après la fusion de 2001. Et quand plusieurs de ces dirigeants bilingues ont postulé à des emplois équivalents dans la nouvelle municipalité, presque aucun n’a été retenu.
Le gouvernement provincial n’a pas aidé. Quand le gouvernement de Bill Davis a annoncé en 1971 que certains services provinciaux pouvaient être offerts en français dans des régions avec plus de 25 % de francophones, la province offrait de financer une partie de ses services. Incluant des cours de langue seconde pour les employés provinciaux et municipaux. Cette générosité disparait avec l’adoption de la Loi sur les services en français des Libéraux en 1986, puisque les municipalités et les universités n’y sont pas soumises. Le premier ministre conservateur Mike Harris n’a pas aidé non plus en refusant d’inclure la protection des droits linguistiques dans sa loi sur les fusions municipales.
Ce qui nous amène à aujourd’hui et à un rapport accablant sur l’amoindrissement du français et des services en français — déjà pas forts — dans le Grand Sudbury.
Serge Dupuis présente sept recommandations pour améliorer cette situation :
- Rédiger un règlement costaud surveillé par le Commissariat provincial;
- Élargir durablement les capacités bilingues du personnel;
- Établir des équipes travaillant en français;
- Fixer un délai pour que les chefs de service soient bilingues;
- Développer l’affichage commercial bilingue;
- Appuyer la mise sur pied d’un organisme «Dialogue Grand Sudbury»;
- Élaborer une évaluation et des plans stratégiques quinquennaux.
Ces recommandations arrivent à point nommé. Le conseil a adopté en avril une résolution visant l’évaluation de sa politique de services en français. M. Dupuis a d’ailleurs présenté son rapport au conseil municipal la semaine dernière et il a été bien reçu par les conseillers.
À la suite de la présentation du rapport lors du Banquet des Franco-Ontariens présenté par l’ACFO du grand Sudbury le 25 septembre, le maire Paul Lefebvre a déclaré qu’il ne voyait pas de difficulté pour que certaines de ces recommandations soient incluses dans une nouvelle mouture du règlement municipal.
Au Voyageur, nous suivrons le dossier assidument. Espérons que les quelque 60 000 personnes bilingues de la région feront de même.