Depuis l’ignoble décès de George Floyd aux mains de la police de Minneapolis et le mouvement de manifestation qu’il a déclenché, plusieurs remettent en question le rôle et les pouvoirs des policiers. C’est à peu près temps.
Depuis des années, la culture nord-américaine met les policiers sur un piédestal. C’est comme si les hommes et femmes en bleu ne pouvaient faire aucun mal. On sait pourtant depuis des années qu’il y a des policiers véreux et violents. On sait qu’il y en a qui utilisent le pouvoir que nous leur donnons pour obtenir toutes sortes de faveurs, financières, sexuelles ou autres. Et l’injustice policière ne se manifeste pas juste envers des groupes minoritaires comme les Noirs ou les Autochtones — même si ceux-ci sont particulièrement visés —, mais envers tout le monde.
Il est désolant qu’il ait fallu la mort de George Floyd et le ras-le-bol qu’elle a déclenché pour qu’enfin, nous commencions à discuter du pouvoir qu’ont les policiers. Parce que, ne nous leurrons pas, tout dans ce débat est une question de pouvoir et d’argent.
Nous remettons un pouvoir immense à des gens souvent mal formés, nous leur enseignons que toute interaction avec des civils est dangereuse et nous leur donnons le pouvoir de vie et de mort sans conséquence. Ils ont des guns alors que la plupart d’entre nous n’en avons pas. De plus, notre système de justice excuse leurs bévues souvent sans grandes conséquences, et ce, depuis des décennies. Qui ne se souvient pas de la bastonnade subie par Rodney King aux mains de policiers finalement trouvés non coupables.
Et c’est pareil au Canada. Qui ne se souvient pas des policiers sherbrookois armés jusqu’aux dents qui, dans les années 1980, ont fait irruption dans une chambre de motel et ont tué froidement deux innocents poseurs de tapis. Ils s’étaient trompés de chambre. Non coupables.
Il est temps que les autorités politiques se penchent sur le rôle, le financement et le type de travail que nous confions aux policiers. La première étape dans cette revue sera bien sûr de dégriffer les fameuses associations de police, alias des unions. Beaucoup de ces unions ont élevé le pouvoir policier au niveau du «bullying» et elles se servent de ce pouvoir pour défendre des ripoux et pour sanctionner leurs propres membres qui osent dénoncer les malversations de leurs collègues. Il faut que ça cesse.
Depuis quelques semaines, on parle aussi d’éliminer les forces policières ou de réduire leur financement. Ce sont des couteaux à deux tranchants. Ceux qui croient qu’on peut éliminer les forces policières sans mettre la société en danger se mettent un doigt dans l’œil. La nature humaine fait que nous aurons toujours besoin de la protection de policiers. Quant au financement, il est clair qu’il pourrait être réduit, mais il faudra s’assurer que les épargnes seront réutilisées pour payer d’autres intervenants — travailleurs sociaux, psychologues, conseillers — mieux placés pour régler des problèmes que nous confions en ce moment à des policiers.
Les questions sont compliquées et nous ne trouverons pas de solutions miracles, mais il est bon que nous examinions enfin le rôle de la police.