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le Lundi 20 juillet 2020 20:11 Francophonie

Recensement 2021 : juste calcul du nombre d’ayants droit à l’éducation en français

Une nouvelle bien accueillie dans la francophonie canadienne
Recensement 2021 : juste calcul du nombre d’ayants droit à l’éducation en français
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Le 17 juillet 2020, le gouvernement fédéral a rendu public le questionnaire du recensement de 2021 confirmant du même coup que les nouvelles questions permettant de brosser un portrait beaucoup plus précis des personnes ayant le droit à l’éducation en français au Canada figureront aux versions courtes et longues du recensement. La nouvelle est accueillie avec joie d’un bout à l’autre du pays au sein de la francophonie canadienne. 

Cette décision vient corriger une lacune qui perdure depuis près de 40 ans. Après l’adoption de la Charte canadienne des droits et libertés, en 1982, le formulaire du recensement n’avait pas été modifié pour inclure des questions sur la langue d’éducation. De nombreux parents, qui ont droit de demander que leurs enfants soient instruits en français en vertu du fait qu’ils ont eux-mêmes ou que l’un de leurs enfants fréquente ou a déjà fréquenté une école de langue française, n’étaient pas dénombrés.

Les exemples d’établissements scolaires remplis au maximum de leur capacité peu de temps après leur ouverture sont nombreux puisque l’évaluation des besoins pour des écoles francophones se basait sur des chiffres qui sous-estimaient la demande réelle. «Les communautés savent depuis longtemps qu’il y a des ayants droit « invisibles », qui ne sont pas comptés par le recensement jusqu’à présent. Ça explique pourquoi dans plusieurs communautés, quand une école ouvre ses portes, elle se remplit immédiatement ou en peu de temps», explique l’avocat en droit public et relations gouvernementales, Darius Bossé.

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Un dénombrement adéquat des ayants droit est d’autant plus important que le droit constitutionnel à l’éducation dans la langue de la minorité est assujetti à un critère numérique, à savoir «là où le nombre le justifie». Le fardeau revient donc aux communautés francophones de démontrer qu’il y a une demande suffisante pour justifier la création de nouvelles écoles. Les données produites lors du prochain recensement permettront ainsi de mieux outiller les francophones dans leurs revendications.

Selon Darius Bossé, cette annonce vient compléter la récente décision de la Cour suprême du Canada dans l’affaire opposant le Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique et le gouvernement de la province.

«Dans sa décision du 12 juin, la Cour suprême nous enseigne que les communautés de langue officielle en situation minoritaire ont le droit à l’équivalence, à l’égalité réelle, peu importe leur taille. Ils ont droit à une éducation réellement équivalente à celle reçue par la majorité dans cette communauté. C’est un développement important, mais n’empêche que l’exercice de ce droit est conditionnel à connaitre le nombre d’ayants droit dans la communauté. C’est en quelque sorte la deuxième moitié du casse-tête qui vient d’être résolue avec l’annonce. Quand nous aurons ces données en 2022, les communautés sauront exactement où elles ont le droit à des écoles homogènes», précise l’avocat.

Un travail de sensibilisation de longue haleine

Depuis trois ans, des organismes communautaires et des conseils scolaires francophones militaient pour que le recensement soit modifié. Si la nécessité d’ajouter des questions linguistiques au recensement de 2021 semblait faire consensus, d’importants doutent persistaient à savoir si celles-ci allaient être ajoutées au formulaire court, rempli par l’ensemble des Canadiens, ou seulement au formulaire long, distribué à un échantillon de 25 % de la population.

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Les intervenants francophones étaient catégoriques, les questions devaient apparaitre à la version courte pour obtenir un portrait adéquat dans les régions où les francophones sont fortement minoritaires. Le 7 juillet dernier, la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada avait lancé une campagne pour inviter la population à écrire au premier ministre Trudeau et à son cabinet à ce sujet. Le gouvernement fédéral a finalement choisi l’option privilégiée par les représentants des communautés francophones.

En plus des demandes provenant des intervenants francophones, les membres du cabinet avaient été interpelés par certains de leurs collègues libéraux. Plusieurs députés fédéraux, dont Marc Serré, Wayne Long, Francis Drouin, Marie-France Lalonde et Darrell Samson, s’étaient prononcés en faveur de l’ajout des questions à la version courte du questionnaire.

Une nouvelle saluée dans la francophonie canadienne

Dans l’heure qui a suivi l’annonce, de multiples messages ont été publiés dans les médias sociaux pour souligner l’impact positif de cette décision pour les communautés francophones. La ministre Mélanie Joly, notamment responsable du dossier des langues officielles au sein du gouvernement fédéral, a souligné l’importance du recensement pour les communautés francophones.

Par voie de communiqué, le président de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA), Jean Johnson, a mentionné le caractère historique de la décision. «Depuis près de 40 ans, nos gouvernements et conseils scolaires n’avaient pas l’ensemble des données nécessaires pour mettre en œuvre nos droits en vertu de l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés. Maintenant, ils pourront mieux planifier les programmes et infrastructures scolaires nécessaires pour répondre à la demande croissante pour une éducation en langue française partout au pays.»

Le sénateur indépendant du Nouveau-Brunswick, René Cormier, a pour sa part tenu à féliciter l’ensemble des personnes qui ont interpelé le gouvernement dans ce dossier.