Au moment d’écrire ces lignes — le lundi 27 janvier — les enseignants ontariens poursuivent leurs grèves rotatives, le premier ministre Doug Ford commence à perdre patience et le ministre de l’Éducation, Stephen Lecce, a disparu des podiums. Aucune reprise des négociations n’est prévue et, pendant ce temps, des centaines de milliers d’élèves perdent des journées d’apprentissage et les parents commencent à trouver le temps long.
Devant le barrage de déclarations contradictoires de la part du gouvernement et des syndicats, il est difficile de comprendre les détails de cette bataille. Mais une chronique publiée aujourd’hui dans le Globe and Mail éclaire un peu la situation. La professeure Nina Bascia de l’Institut ontarien d’études en éducation y affirme que l’enjeu fondamental est la position dominante de l’Ontario dans le secteur de l’éducation mondiale. Ça fait réfléchir.
Malgré les soubresauts politiques des dernières décennies, Mme Bascia maintient que l’Ontario est un chef de file mondial dans le domaine de l’éducation. Selon la chercheure, des avancées comme les garderies scolaires, la maternelle à plein temps, la proportion élèves/enseignants, les aides-enseignants, les bons salaires et même le transport scolaire font de notre système un modèle dans le monde. Elle admet que le système peut être amélioré, mais elle ne croit pas que les changements proposés par Ford et compagnie vont en ce sens.
Les principaux points en litige sont les salaires, le nombre d’élèves par classe et le nombre de cours en ligne obligatoires. Au chapitre des salaires, la chroniqueuse indique que l’augmentation de 2 % réclamée par les syndicats reflète le taux d’inflation et est inférieure à ce que la province a déjà accordé aux policiers, pourtant mieux payés que les enseignants.
Quant aux deux cours en ligne obligatoires — au départ la province en voulait quatre — Mme Bascia répète l’argument de plusieurs spécialistes; que les élèves n’ont pas tous accès à des ordinateurs ou à internet.
Mais là où elle croit vraiment que la province fait fausse route, c’est en voulant réduire le nombre d’enseignants, que ce soit par les cours en ligne ou en augmentant le nombre d’élèves en salle de classe.
Selon la professeure, la réduction du nombre d’enseignants entrainera une diminution du financement aux conseils scolaires qui devront couper leurs services. Elle prévoit des coupures dans les activités parascolaires, dans les maternelles à temps plein et dans le transport scolaire. D’ailleurs, sur ce dernier point, le gouvernement a justement annoncé lundi un examen du système de transport scolaire… devrait-on s’inquiéter? Mais là où la baisse du financement lui fait le plus peur, c’est la réduction inévitable du nombre de programmes pédagogiques offerts dans nos écoles. Et ça, c’est assez dramatique.
Il n’y a donc qu’une seule solution à l’actuel bras de fer entre les enseignants et le gouvernement Ford. Une négociation fructueuse est toujours donnant-donnant. Il serait peut-être bon que les syndicats acceptent un contrat de deux ans prévoyant une augmentation salariale de 1 % et, qu’en échange, le gouvernement abandonne sa position sur l’augmentation du nombre d’élèves et les cours en ligne. En fin de compte, ce sont les élèves ontariens qui seraient gagnants.