«Quand je suis arrivé à l’ACFO-Témiskaming, je n’ai jamais poussé dans le dos des gens du village. Plus on se chicane, plus on est “colons” et plus on se chicane, plus les anglophones rient de nous», a appris Jean-Claude Carrière au cours de ses nombreuses années à titre d’agent de développement communautaire à l’ACFO-Témiskaming. Il a vite compris que le succès réside dans la collaboration.
«Je me suis toujours assuré qu’il y avait de la place pour tous : qu’ils vivent à Earlton, Haileybury, Belle-Vallée, Cobalt, Elk Lake ou New Liskeard.»
À celle qui lui avait dit : «Je veux m’impliquer dans l’ACFO, mais j’ai peur des grands mots», Jean-Claude avait répondu : «On va les couper en deux.»
Ça, c’est du Jean-Claude tout craché! L’homme sait rassembler. Lorsqu’il est entré en poste, ayant travaillé à l’ACFO-Témiskaming de 1990 à 1995 puis de nouveau depuis 2002, il a demandé à l’une des employées pourquoi l’équipe de l’ACFO ne travaillait pas ensemble. Elle lui avait répondu : «Lis les procès-verbaux des dernières années et ne commets pas les mêmes erreurs.»
«On est toujours capable de s’entendre», estime Jean-Claude Carrière. L’exemple le plus éloquent de cette philosophie de vie est lorsqu’il a initié le projet «Tisser des liens», en 2011. Ce projet vise à mettre en relation les Autochtones, les anglophones et les francophones des Témiskaming québécois et ontarien. Aujourd’hui, ce sont les autorités municipales qui ont pris en charge le projet «Tisser des liens».
Des projets marquants
Parmi les autres hauts faits d’armes de Jean-Claude, il y a eu son implication dans la mise sur pied du Centre de santé communautaire du Témiskaming (CSCT). Devant un premier refus, il ne s’est pas découragé et s’est allié à des médecins pour présenter une nouvelle demande, qui a été acceptée.
Il ne faut pas non plus oublier les évènements sociaux, comme le Brunch des organismes qui a fêté ses 25 années en 2020. À cette occasion, 150 personnes se sont réunies pour cette célébration qui reconnait le ou la bénévole de l’année ainsi que la personnalité jeunesse de l’année. «J’ai senti que les gens étaient fiers d’être là!», assure M. Carrière.
Enfin, dans la crise franco-ontarienne qui a secoué la communauté en 2018, plus de 200 personnes se sont rendues pour manifester à l’appel de Jean-Claude Carrière.
«On a aussi mis sur pied une coopérative jeunesse. C’est important de développer le sentiment d’appartenance des jeunes à leur communauté. C’est comme avec les nombreuses personnes qui ont travaillé à l’ACFO au cours des années : elles n’étaient pas nécessairement convaincues au début, mais j’apprends de temps en temps que certaines ont posé des gestes d’affirmation de leur francophonie. Pour moi, c’est une satisfaction personnelle», ajoute-t-il.
Entre doutes et espoir
C’est un francophone jusqu’au fond de son âme. «Je ne suis pas fier d’être francophone; je n’ai rien fait pour ça! C’est qui je suis. Mais je n’en ai pas honte! Se faire traiter de “little Frenchman”, ça marque.»
Jean-Claude pourrait raconter bien des anecdotes à ce sujet. «J’ai frappé des murs, puis j’ai appris à passer à gauche et à droite.» Il se voit aujourd’hui comme un ambassadeur de la francophonie et la communauté de langue anglaise du sud du Témiskaming le considère comme un interlocuteur crédible et à l’écoute.
Il a cessé depuis bien longtemps d’essayer de «défendre» qui il est.
En somme, pour Jean-Claude Carrière, la collaboration est primordiale. Son conseil : «Prends soin d’écouter l’autre, même si c’est pas toujours facile.» Pour ce qui est de la francophonie, il a parfois des doutes. «J’ai de l’espoir quand même; les jeunes sont toujours là. Il y a plein de choses qui sont tombées, mais elles sont toujours remplacées par autre chose.»
Jean-Claude prendra sa retraite de l’ACFO-Témiskaming en 2021. Sa réflexion : «Il faudra trouver la bonne personne pour prendre la relève. Le conseil aura à l’appuyer, parce que c’est un poste où on peut se sentir seul. Moi, j’ai eu Jeanne-d’Arc Gauthier qui a été là pour moi et je la remercie!»