Le point de vue ne présente aucun argument en faveur de l’Université. On y fait état de mauvaise gestion, d’apparences de conflits d’intérêts au sein du conseil des gouverneurs, d’un choix délibéré d’avoir recours à la LACC, du peu d’effort de tentative de collaboration avec le ministère, du manque de transparence de l’administration, d’investissements sans tenir compte des risques…
D’entrée de jeu, la vérificatrice générale, Bonnie Lysyk, précise qu’elle publie cet avis préliminaire en raison de l’approche des élections provinciales. «En raison du manque constant de collaboration de la Laurentienne et comme celle-ci a constamment tardé à nous donner un accès sans entrave aux documents et aux personnes, il est peu probable que nous puissions déposer notre rapport d’audit spécial avant la dissolution de l’Assemblée législative.»
Le choix de la LACC
«Nous croyons que la Laurentienne n’était pas tenue de se placer à l’abri de ses créanciers en vertu de la LACC. Elle a stratégiquement planifié et choisi de le faire devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario le 1er février 2021», peut-on lire en toutes lettres dans le rapport.
Elle explique que les procédures habituelles — comme de collaborer de façon transparente avec le ministère pour obtenir de l’aide ou de déclencher la clause d’obligation financière comme le syndicat des professeurs le demandait — n’ont pas été suivies.
Mme Lysyk estime que l’étude sérieuse du recours à la LACC a commencé au printemps 2020. En mars 2022, 24 millions $ en «couts supplémentaires pour l’université, aux prises avec une situation financière difficile». Elle évalue que les firmes externes engagées pour évaluer des options stratégiques quant aux difficultés financières ont largement mené à la solution actuelle.
Elle donne raison à la critique de l’Association des professeures et professeurs de l’Université Laurentienne (APPUL) qui accuse leur employeur de manque de transparence et de collaboration depuis l’automne 2020.
«Elle a ainsi amorcé un processus qui a permis de consacrer plus d’argent à des conseillers externes au moyen d’honoraires professionnels, s’est révélé moins transparent et a probablement eu et continuera d’avoir une plus grande incidence sur les étudiants, le corps professoral, la communauté de Sudbury et la réputation de l’université», peut-on lire dans le rapport.
Pas ceux qu’on dit
Bonnie Lysyk rejette également l’un des arguments invoqués par la direction : le cout trop grand du corps professoral. Son analyse lui fait dire que les «couts généraux du corps professoral de la Laurentienne ne dépassaient pas de façon significative ceux des universités comparables».
Par contre, entre 2010 et 2020, les frais associés à la haute direction ont augmenté d’environ 75 %. Dans ce cas, la taille de l’administration était plus importante que celle d’université de taille comparable de l’Ontario.
Elle fait également état, comme le rapport du Nous Group, de pratiques d’embauches non transparentes.
Le Conseil des gouverneurs, de son côté, n’a pas fait les démarches pour avoir toutes les données pour bien comprendre et évaluer les questions financières et ses comités n’ont pas rempli leur rôle. Trop de réunions à huis clos et des «membres du Conseil participaient à des discussions et à des décisions comportant des répercussions personnelles ou professionnelles pour eux, ce qui soulevait des préoccupations en matière de conflits d’intérêts».
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Problèmes de longue date
Le rapport préliminaire ne nie pas l’influence de la COVID-19 et du gel des droits de scolarité sur la situation, mais indique que les indices des difficultés financières remontent aussi loin qu’à 2009.
Déjà cette année-là, un plan avait été mis en place pour réduire les dépenses. Le nouveau président qui est entré en poste en 2009 — il n’est pas nommé dans le rapport, mais Dominic Giroux est devenu recteur le 1er avril 2009 — a lancé le plan de modernisation et d’expansion qui a fait augmenter la dette. «[…] nous avons établi que la cause principale de la détérioration de la situation financière de l’université de 2010 à 2020 était le maintien de dépenses en immobilisations peu réfléchies», est-il écrit.
La dette à long terme de l’Université est grimpée à 87 millions $. La Banque Royale du Canada a refusé en 2016 d’augmenter la dette à long terme. C’est à ce moment que l’Université est allée chercher des lignes de crédit à court terme. «Au fur et à mesure que l’accès au financement diminuait, l’université a accéléré l’utilisation des fonds destinés à d’autres fins, comme les prestations de santé des employés et les fonds destinés expressément aux projets de recherche universitaire.»
Malgré les investissements dans l’expansion, avant la LACC, la Laurentienne évaluait être en retard de 135 millions $ sur les réparations nécessaires sur le campus.
La part du gouvernement
Le ministère des Collèges et Universités est également écorché dans le rapport. Il n’a pas les outils de surveillance nécessaires en place pour agir de façon proactive.
Mais même s’il avait été prêt à aider, l’Université ne lui en a pas donné l’occasion. Selon la vérificatrice générale, la demande d’aide financière de décembre 2020 n’était pas assez précise et s’adressait au ministre au lieu de «travailler plus tôt et de façon plus transparente avec le personnel du ministère».
Le gouvernement a également négligé d’évaluer les répercussions de ses décisions financières sur les universités, alors qu’il a la responsabilité d’en tenir compte.
Réponse
En après-midi, le conseil des gouverneurs a répondu au rapport. Il dit «accepte volontiers le document et les conseils qu’il offre» et rappelle quelques-uns des changements déjà effectués.
Ils annonceront plus tard les mesures supplémentaires qui seront prises.