Savez-vous vraiment comment s’applique une procuration? La puissance de ce document juridique est souvent sous-estimée selon l’avocate pour Soutien juridique Nord, Madeleine Hébert. L’un des problèmes, c’est que ce sont des personnes déjà vulnérables qui en auront besoin, de là l’importance d’y penser longtemps à l’avance.
L’avocate couvre, en collaboration avec les 11 cliniques juridiques de la région, le Nord de l’Ontario pour les questions juridiques touchant les personnes âgées, et ce, depuis janvier 2019. Dans les dernières années de son mandat, la première ministre Kathleen Wynne avait augmenté le financement de l’aide juridique en Ontario afin de mieux couvrir les domaines du droit mal desservis. L’aide aux ainés est l’un de ces domaines.
«Je travaille beaucoup avec les questions juridiques pendant que les gens sont vivants. Beaucoup de personnes âgées veulent des testaments, mais nous, on s’occupe plus des procurations, du consentement et de l’incapacité, les admissions dans les centres de soins de longue durée», décrit Mme Hébert.
Ses tâches incluent de l’éducation communautaire par le biais de présentations à des groupes et par des conseils juridiques, mais elle traite également des dossiers juridiques pour des gens qui sont abusés financièrement. Les cas qu’elle croise se rendent très rarement en cour, puisque les personnes âgées sont la plupart du temps en mode de survie financière.
La demande pour ce service est tellement grande qu’il y a du travail pour cinq personnes, dit-elle.
Problèmes de procuration
L’un des problèmes que Mme Hébert rencontre le plus fréquemment est la mauvaise compréhension de ce qu’est une procuration. «Les procurations, c’est comme signer un chèque en blanc. Les gens ne réalisent pas le pouvoir qu’ils donnent à quelqu’un d’autre.»
Il y a également de la confusion quant au moment où une procuration devient effective. «C’est quoi l’incapacité? Est-ce qu’une personne est globalement incapable ou est-ce qu’elle est capable pour certains sujets? Je dis aux gens dans mes présentations que le procureur de la procuration n’est pas ton patron jusqu’à ce que tu sois totalement incapable. Il est ton employé pendant que tu es capable. Donc, il doit suivre tes directives.»
Il est possible de diviser les responsabilités d’une procuration. «Il y a des gens que j’aide avec des procurations pour les soins de la personne, mais pour les finances, je leur dis qu’elles ne sont pas un cas approprié, parce qu’elles risquent d’être abusées financièrement», explique l’avocate. Et ce n’est pas toujours les enfants qui causent le plus de risques. Le danger peut venir des personnes de l’entourage des enfants, qui mettent de la pression sur le responsable de la procuration.
Il arrive régulièrement que les gens comprennent trop tard qu’ils ont besoin d’une procuration.
Elle souligne de faire attention à l’amalgamation des testaments et des procurations. Les deux sont souvent signés en même temps, mais l’avocat passe habituellement plus de temps à expliquer le testament que la procuration. «Et selon nous, c’est le document le plus important, parce que tu es encore vivant.»
«Le système juridique est, selon moi, très complexe pour une période de ta vie où tu veux simplifier les choses. Mais je comprends le principe, qui est de donner à la personne âgée l’indépendance le plus longtemps possible. C’est aussi pour sa dignité. L’idée est bonne, mais entre la pratique et la théorie, il y a un trou.»
L’impact de la COVID-19
Comme pour plusieurs, le travail de Madeleine Hébert est perturbé par les mesures d’éloignement social en raison de la COVID-19. Elle doit être encore plus prudente, puisqu’elle travaille avec les personnes âgées, à risque d’être plus malade.
Elle ne peut plus rencontrer de gens en personne et très peu de personnes âgées ont accès à la vidéoconférence. Pourtant, sa responsabilité est de s’assurer que la personne qu’elle aide comprend bien ce qu’elle lui a expliqué. Pour y arriver, elle doit voir les expressions faciales des gens.
«En temps normal, je me déplace pour visiter les clients qui sont incapables de se rendre à mon bureau — pour les régions du Grand Sudbury, Manitoulin et North Bay. Dans les autres régions, quand j’ai un doute sur la capacité de compréhension, je dois faire des arrangements spéciaux en demandant l’intervention de l’un de mes collègues dans les 11 cliniques juridiques du Nord ou préparer une visite en personne lors de mon prochain séjour dans la région en question.»
Les séances d’information de groupes qu’elle devait prochainement donner ont été reportées.