Dans le Nord de l’Ontario, les organismes francophones mettent à profit leur créativité afin d’encourager les membres de leur communauté à continuer de vivre en français en ces temps d’isolement. Malgré l’obligation d’annuler de nombreux évènements, ils ne désespèrent pas et demeurent pour la plupart accessibles via le web.
«Le fait que les jeunes de familles anglophones ou exogames ne puissent pas aller à l’école, où ils parlent français, est vraiment inquiétant. On ne veut pas qu’ils le perdent», s’inquiète l’agente de liaison communautaire de l’Association francophone de Red Lake (AFRL), Agathe Breton-Plouffe.
«C’est pour ça que nous avons décidé d’enregistrer des livres en français pour les petits, pour qu’ils puissent lire à la maison et garder leur français. C’est important pour plusieurs, alors on se force à être créatifs!», ajoute-t-elle.
Ces vidéos sont affichées dans le groupe Facebook de l’AFRL et les membres sont d’ailleurs invités à y partager des activités en français, comme présenter une recette ou quelques pas de danse.
L’équipe a dû annuler plusieurs activités prévues au cours des prochains mois, dont l’heure du conte musical et les soupers francophones.
Un nouveau style de vie
Il en va de même pour le Centre francophone de Sault-Ste-Marie (CFSSM), qui a fermé ses portes et annulé ses activités, dont les soirées artisanales, suspendues jusqu’à nouvel ordre. Le CFSSM a tout de même tenu une séance publique par vidéoconférence au début avril pour discuter de son plan stratégique en compagnie du public et du consultant Pierre Bourbeau de la firme Discitus.
La vice-présidente et animatrice du CFSSM, Colette Chiarello, a offert pour sa part une session en direct pour les petits sur la page Facebook du centre, le 7 avril à 11 h.
«On s’adapte tranquillement à un nouveau style de vie», lance la présidente du CFSSM, Jessica Torrance. Pour maintenir la communication, j’ai fait une vidéo en direct [sur Facebook] pour inviter les gens et leur demander comment ça allait. Je les invite aussi à publier sur notre page des choses qu’ils font à la maison. Malgré qu’on ne puisse pas se rencontrer, on essaye de faire des petites choses comme ça pour garder le monde au courant et actif en français!», souligne-t-elle.

Le Festival de Folies Franco-Fun annulé
De son côté, l’ACFO-Témiskaming a notamment dû annuler le tant attendu 15e anniversaire du Festival de Folies Franco-Fun. «On devait avoir notre soirée de lancement le 1er avril, mais la ville a demandé d’annuler le festival qui devait se tenir du 29 avril au 3 mai», se désole l’agent de développement communautaire, Jean-Claude Carrière. À l’heure actuelle, les salles communautaires ne peuvent être réservées avant le 1er aout.
L’ACFO-Témiskaming a dû mettre à pied l’un de ses employés. L’appui pour l’organisation du festival, assuré par une stagiaire du collège Canadore, a également pris fin.
Pour le moment, M. Carrière ne s’inquiète pas trop de la vitalité de l’organisme : «L’ACFO-Témiskaming vit surtout de subventions. Tant que le gouvernement va nous aider de ce côté-là, ça ira, mais s’il décide d’arrêter, si les temps deviennent plus graves, alors là il va falloir penser à l’avenir de l’organisme.»
Afin de garder les francophones de sa région branchés, M. Carrière fait circuler les annonces qu’il reçoit du Service de santé du Timiskaming.
Les ainés «trouvent le temps long»
De son côté, l’Association des francophones du Nord-Ouest de l’Ontario (AFNOO), basée à Thunder Bay, a affiché des mesures préventives sur son site web afin de protéger son personnel et les communautés desservies par l’organisme. Ses bureaux sont fermés et ses activités sont annulées, bien qu’ils demeurent disponibles virtuellement pour les groupes membres et partenaires.
Le Club Action Hearst, qui offre des activités pour les retraités, suit la même tendance et a fermé ses portes au mois de mars, indique le président du club, Pierre Brochu. Sans les jeux, les repas et les bingos, «les membres trouvent le temps long. Plusieurs ne croient pas encore qu’ils doivent rester à la maison. Il y en a qui font attention, mais ça les travaille beaucoup. On attend le OK du gouvernement ou du Service de santé publique pour reprendre nos activités», témoigne-t-il.
Aux dires de M. Brochu, certains prennent bien leurs précautions, mais d’autres sont plutôt frustrés, car ils ne reçoivent plus de visite.
Suivre les directives, même si c’est difficile
«J’espère que les gens suivent les directives pour se garder en santé. Ça ne doit pas être le fun de se faire intuber, alors suivez les directives, même si c’est plate à la maison!», recommande Jean-Claude Carrière.
«En tant que grands-parents, on peut parler à nos petits-enfants à travers Internet, même si c’est moins plaisant. J’aimerais mieux les prendre dans mes bras et leur conter des histoires… et des menteries!» plaisante l’agent de développement de l’ACFO-Témiskaming.
Ce qu’il trouve le plus difficile, c’est de ne pas voir les gens de sa communauté. «On avait toujours beaucoup de visite au centre et là, il n’y en a pas. On va prendre notre mal en patience et espérer que ça ira pour le mieux.»