Un long message poursuit, en français, et vous explique que ce droit est réservé à quelques exceptions. Mécontent, vous raccrochez et tentez votre chance sur le site web. Pas de chance, un bandeau apparait sur le site et vous explique à peu près la même chose.
C’est ce qui arrive maintenant à un Québécois anglophone qui veut communiquer avec sa municipalité ou une agence gouvernementale du Québec dans sa langue. Imaginez le «hola!» collectif de l’Ontario français et de toutes les communautés francophones du Canada si nos provinces ou nos villes nous faisaient ça.
Souvenez-vous de la levée de boucliers lorsqu’une seule ville ontarienne, Sault-Ste-Marie, s’est déclarée unilingue anglaise. Où encore quand le gouvernement Ford a annulé le financement de l’université française de Toronto et aboli le Commissariat aux services en français. Même le Québec s’est alors soulevé contre ces iniquités. Le séparatiste Guy A. Lepage avait même invité des Franco-Ontariens à Tout le monde en parle. C’est peu dire.
Maintenant le Québec fait bien pire. Tous les paliers de gouvernement québécois compliquent la vie aux anglophones. Certaines villes et agences québécoises n’y sont pas aller avec le dos de la cuillère, elles ont tout simplement effacé leur site web anglais.
Il y a des exceptions qui leur permettent de communiquer en anglais : être autochtone, être un immigrant arrivé depuis moins de six mois, être admissible aux écoles anglaises, avoir communiqué en anglais avec le gouvernement avant mai 2021 (date d’adoption de la loi) ou appeler de l’extérieur du Québec. Les messages ne stipulent cependant pas s’il y aura des répercussions si une personne atteste faussement être une de ces exceptions. Mais imaginez comment un.e citoyen.ne peut se sentir quand on le.la traite d’exception.
Ces pratiques sont mandatées par la Loi sur la langue officielle et commune du Québec, le français (loi 96), adoptée l’an dernier. Loi commune effectivement*. Le gouvernement Legault affirme que ces mesures draconiennes sont nécessaires pour protéger le français qui serait en déclin au Québec. En fait, le français est en déclin à Montréal, pas partout au Québec.
Bien sûr, il est important de protéger le français dans une continent où l’anglais, suprêmement majoritaire, constitue une force d’attraction quasi irrésistible. Mais ce n’est pas en bafouant les droits d’une minorité qu’on renforce une langue qu’on veut commune. C’est plutôt en démontrant sa vitalité, son importance mondiale et la riche culture qu’elle véhicule. Et c’est surtout en rendant son apprentissage accessible et facile.
Il est clair aussi que les Anglo-québécois ont été historiquement choyés. Leur position de pouvoir en tant que descendants des conquérants leur a permis de financer des hôpitaux, des écoles et des universités de langue anglaise réputées. Institutions qui sont maintenant bilingues, faut-il ajouter. Mais ce n’est pas parce que l’histoire les a bien traités qu’il faut maintenant les maltraiter.
* Qui n’appartient pas à l’élite, n’est pas distingué. ➙ quelconque, trivial, vulgaire. «Il a des manières très communes». © Le Petit Robert 2022