le Mercredi 23 avril 2025
le Mercredi 6 septembre 2023 11:15 Éditorial

Un automne chaud

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Éditorial — En fin de semaine dernière nous avons célébré la fête du Travail. En Amérique, nous fêtons les travailleurs le premier lundi de septembre, contrairement à l’Europe qui célèbre le 1er mai. Pourquoi, demanderez-vous?
Un automne chaud
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Parce que l’Amérique a eu peur de la Russie bolchevique et communiste qui a décrété en premier cette fête. L’Amérique, incluant le Canada, n’a jamais été du bord des travailleurs. Pourtant, cet automne, les travailleurs canadiens sont bien déterminés à «flexer» leurs muscles. On peut s’attendre à de dures négociations et à des grèves dans plusieurs domaines.

Certains travailleurs ont déjà montré la voie. Souvenons-nous de la grève des travailleurs du port de Vancouver. À deux reprises, ils ont refusé une entente contractuelle pourtant entérinée par le comité de négociation de leur syndicat. Les travailleurs des épiceries Métro de la région de Toronto ont fait la même chose. Ces deux arrêts de travail ont été réglés, mais pas sans que les travailleurs poussent les employeurs à augmenter sensiblement leurs salaires et à améliorer leurs conditions de travail. Ce n’est que le commencement d’un automne chaud. 

Le plus gros syndicat industriel au pays, Unifor, a déjà choisi la société Ford pour entamer ses négociations avec le secteur automobile. Les fabricants d’automobiles engrangent des profits records depuis quelques années et les travailleurs le savent. Ils veulent maintenant récupérer une partie des concessions financières qu’ils ont consenties lors de la crise de 2008-2009 et protéger leurs emplois face aux changements qui approchent avec les transitions vers les voitures électriques. Ça risque de jouer dur.

L’automobile n’est pas le seul secteur où on prévoit des négociations difficiles. En Ontario, les travailleurs de TVO-TFO sont présentement en grève et rien n’indique qu’une entente sera bientôt conclue. 

Mais la possibilité d’une grève en éducation ferait bien plus mal. Le syndicat représentant les enseignants des conseils publics anglais a déjà annoncé qu’il tiendra bientôt un vote de grève. Les quatre syndicats des enseignants continuent de négocier, mais trois des quatre ont indiqué qu’ils auraient recours à des arrêts de travail si le gouvernement n’améliore pas ses offres. Le ministre de l’Éducation Stephen Lecce — qui, lui, jouit d’un salaire de 165 851 $ (2022) — veut que les parties soient soumises à l’arbitrage obligatoire, mais, jusqu’à présent, un seul syndicat a accepté.

Un nouveau développement dans le secteur de la vente au détail pourrait aussi brasser la cage. Les jeunes travailleurs de Sephora, Cineplex, Starbucks, Indigo et PetSmart viennent de se syndiquer. Les verrons-nous marcher avec des piquets de grève devant les centres d’achats et les cinémas? À voir.

La montée en puissance des travailleurs et des syndicats était à prévoir. La plupart n’en peuvent plus de payer plus cher pour tout alors que leurs salaires stagnent. Le prix de l’épicerie a augmenté de plus de 8 % cette année, sans compter le prix de l’essence et l’augmentation astronomique des loyers et des maisons. Il est difficile pour les familles de vivre avec des augmentations salariales de quelque 2 % alors que le cout de la vie augmente trois ou quatre fois plus rapidement.

On peut comprendre les travailleurs, mais ce qu’il faut aussi comprendre, c’est que pour chaque contrat qui comporte de sérieuses hausses de salaire, nous verrons une hausse correspondante des prix dans ce secteur. C’est un cercle vicieux où les travailleurs ne peuvent pas gagner dans un capitalisme sans freins de sureté.