M.Comeau s’est intéressé à l’Ordre de Jacques-Cartier lorsque son père lui a appris, sur son lit de mort, qu’il en avait été membre. Curieux, il a cherché à consulter des documents officiels et rencontrer d’anciens membres. 

«Je voulais surtout parler de ce qui s’était passé en Acadie. Parce que c’était assez extraordinaire de réussir à faire élire un premier ministre francophone», dit le réalisateur. Ce premier ministre, Louis Robichaud, était membre de l’Ordre de Jacques-Cartier. Les six francophones membres de son cabinet l’étaient aussi. 

«Sans l’Ordre de Jacques-Cartier, on serait probablement encore des citoyens de seconde classe», avance M. Comeau. Surement dans un pays qui a l’anglais comme seule langue officielle. Ils n’ont pas travaillé seuls, l’ACFÉO en Ontario par exemple faisait la portion plus publique du travail, mais les actions que la Patente a initiées ont contribué à mettre de la pression sur les gouvernements.

«J’espère que les jeunes vont voir le film, pour qu’ils comprennent que ce qu’ils ont aujourd’hui, il ne faut pas qu’ils le prennent pour acquis. Ce sont leur père, leur grand-père, leurs cousins et leurs oncles qui ont travaillé très fort dans l’ombre.» Services, éducation, musique, théâtre sont encore disponibles dans la langue de Molière grâce à leur travail.

En Ontario

Les Francos-Ontariens du Nord de l’Ontario n’ont pas tardé à créer des commanderies de l’Ordre de Jacques-Cartier. Selon la liste des groupes de l’Ontario fournie par M. Comeau, la plus ancienne commanderie du Nord était à Kapuskasing. Elle portait le numéro XC5 — elle serait donc la 5e créée au Canada — et a été officialisée en septembre 1928. 

Suivent des commanderies à ​​North Bay (XC6, 1928), Sturgeon Falls (XC9,1928), Timmins (XC12,1929) et Sudbury (XC12,1929). Il y en aura à la fin plus d’une à Sudbury et Timmins. Le nom de celle de Verner revient également à plusieurs reprises, attaché à la création d’autres commanderies. (Nous publierons la liste complète sur https://levoyageur.ca.)

À partir des informations qu’il a recueillies, M. Comeau croit que l’Ordre de Jacques-Cartier a probablement joué un rôle dans la création de l’Université Laurentienne, de la venue des antennes de Radio-Canada dans le Nord et l’ouverture des écoles secondaires de langue française, comme l’École secondaire Macdonald-Cartier en 1969. Même si l’école a ouvert après 1965, le long travail de lobbying avait commencé bien avant. 

De plus, plusieurs commanderies sont restées actives après 1965 sous le nom de Commandeurs de l’Ordre des Franco-Ontariens. Le fondateur du journal Le Voyageur, Émile Guy, a d’ailleurs confirmé que le journal avait été créé à la demande de ce groupe.

Phil Comeau a un autre lien avec le Nord de l’Ontario. Marcel Aymar, que l’on vient de revoir à la Nuit sur l’étang, était son voisin dans sa jeunesse. Il est venu quelques fois à Sudbury quand son ami étudiait à l’Université Laurentienne. 

La Patente était réservée aux hommes. Mais M. Comeau a retrouvé un femme d’Ottawa, Marthe Caron, qui avait été embauchée comme secrétaire. Elle n’était pas payée en argent, ils lui ont plutôt fourni une femme de ménage. «Elle était bien contente, parce qu’elle préférait faire du secrétariat que du ménage», lance M. Comeau.

Il est possible de consulter à distance le registre des membres de l’Ordre (en format numérique) en contactant le Centre de recherche sur les francophonies canadiennes de l’Université d’Ottawa : https://www.uottawa.ca/recherche-innovation/crccf.

Le film L’ordre secret est un documentaire entrecoupé de reconstruction historique. L’ACFO du grand Sudbury présente le film au Sudbury Indie cinema le dimanche 2 avril à 15 h. Une entrevue vidéo avec Phil Comeau réalisée par Le Voyageur (avec des questions différentes) sera présentée avant le film.

Record Guinness

Phil Comeau est un réalisateur prolifique. Selon le site IMDB, il a réalisé 37 films et émissions de télévision. Certaines de ses réalisations ont remporté plusieurs prix.

D’ailleurs, il tente de faire homologuer le succès de son court-métrage Belle-Île en Acadie (2019) par les records Guinness. Ce documentaire sur des Français d’origines acadiennes de la ville Belle-Île-en-Mer et qui sont venus au Congrès mondial acadien de 2019 a reçu 457 prix à travers le monde.  

«C’est très sérieux les prix Guinness. Ça prend une lettre de toutes les présidences [de festival]. Il m’en reste une vingtaine à recevoir, dit-il. Ils m’ont dit que j’ai le record», il doit simplement être confirmé avec documentation à l’appui «au cas ou quelqu’un essaie de me dépasser.»