Le temps des Fêtes passé, nous vous faisons part d’un incident vécu et du processus de réflexion qui en a découlé. Vous avez peut-être fait face à ce genre de dilemme en tant que parent. Le personnel éducateur qui coapprend avec les enfants leur laisse toute la place possible pour qu’ils puissent s’affirmer et développer leur confiance en soi et leur créativité, tout en créant des espaces sécuritaires. Dans de telles circonstances, qu’auriez-vous fait?
C’est la veille de Noël et nous nous préparons pour une fête en famille. J’ai les vêtements des gars étalés sur leurs lits. J’imagine mes deux garçons habillés pareil dans leurs chandails de Noël et leurs pantalons propres. En me préparant, j’annonce : «OK les garçons, allez vous habiller; on partira bientôt», sans spécifier qu’ils devaient porter les vêtements qui étaient sur leurs lits.
Le plus jeune de mes fils, âgé de 4 ans, cherche des vêtements dans sa garde-robe sans que je m’en aperçoive. Quelques minutes plus tard, il sort de la chambre, vêtu d’un vieux pantalon de jogging vert foncé, un teeshirt de dinosaures brun et des bas de Noël rouge vif montés jusqu’aux genoux. Très fièrement, il annonce : «Regarde Maman, je porte du rouge, du vert et des dinosaures. C’est parfait pour Noël!»
Je suis tellement tentée de lui dire : «Non, non va mettre ton beau chandail et tes pantalons propres. C’est Noël!». Mais je vois la fierté sur son visage et je fige.
Je suis une éducatrice en petite enfance inscrite et depuis mes débuts, en 2006, les professionnels du domaine parlent de l’importance du processus et non du produit final. Nous parlons souvent de ce concept quand les enfants font de l’art, par exemple, ou lors d’expériences nouvelles.
L’Association canadienne des programmes de ressources pour la famille a même publié un article à ce sujet :
«Quand vous faites des activités d’art et de bricolage avec les enfants, le processus, le déroulement de l’activité est souvent beaucoup plus important que le produit, son résultat final. Ce sont autant d’occasions d’exercer leurs aptitudes de résolution de problèmes. Encouragez-les à faire les choses à leur manière, même si ça ne réussit pas toujours.»
La dernière phrase me revient à l’esprit : « Encouragez-les à faire les choses à leur manière, même si ça ne réussit pas toujours.»
Il y a certainement des limites et des contraintes quand l’enfant veut faire à sa manière. Si ce n’est pas bon pour sa santé ou sa sécurité, il faut une intervention moins démocratique.
Cependant, son habillement ne fait de mal à personne…
Je pense aussi à mes valeurs. Comme parent et éducatrice, je valorise énormément le respect mutuel, l’indépendance et l’estime de soi. Je crois réellement et fortement que l’enfant est compétent et capable. Je travaille régulièrement pour que «mes bottines suivent mes babines». Quelle intervention sera la meilleure pour soutenir mes valeurs?
Mon dialogue intérieur parle fort et je pense à ce que la famille va dire quand elle le verra «mal» habillé… ou aux photos de la veille de Noël qui ne seront pas «parfaites» à cause de ses habits. Je le regarde, il attend toujours ma réaction, ses yeux scintillants et son sourire tout fier.
Alors, avec toute l’incertitude du monde je réponds : «Oui mon amour, c’est parfait…»
Nous sommes allés au souper de la veille de Noël, les photos étaient aussi belles que d’habitude et personne n’était offusqué par ses habits. Il rayonnait, il était fier de dire qu’il avait choisi de porter du vert, du rouge et des dinosaures.
Lorsqu’on se laisse guider par nos valeurs, qu’on encourage l’autonomie et l’indépendance, lorsqu’on se concentre sur le processus et non le produit final, notre perspective et nos priorités changent.
Que ce soit avec l’art, les bricolages ou avec l’habillement, laisser l’enfant faire à sa manière encourage et développe sa confiance en soi et ça, c’est parfait!