TVA s’était déjà vanté de couronner «la voix du Québec», mais comme l’a fait remarquer la journaliste Rachel Bolduc-Crustin à ONFR+, c’est une voix franco-ontarienne qui été entendue lors de la finale de La Voix, dimanche dernier, où Mme Grenier «a profité de son passage dans une compétition majoritairement québécoise pour mettre en lumière la francophonie canadienne».
Oui. Et voilà pourquoi nous l’adorons.
La victoire de Mme Grenier au Québec comporte également un sous-texte franco-culturel important. Comme de nombreux Franco-Ontariens dans la belle province, Mme Grenier a dû défendre son unique parler : «Quand ils entendent mon accent, les gens pensent que je suis anglophone, mais ma langue maternelle, c’est vraiment le français ! »
«C’est sûr qu’au Québec, ils se battent aussi pour la langue française», a-t-elle déclaré. «En même temps, ils oublient qu’en Ontario, ce n’est pas juste de l’anglais. Que dans les autres parties du Canada, il n’y a pas juste des anglophones qui ont appris le français. Il y a des francophones.»
Mais si elle enflamme l’une des plus grandes scènes du Québec, la jeune chanteuse a également montré que les Franco-Ontariens peuvent être des artistes universels dans la stratosphère mondiale lorsqu’elle a chanté Puisque tu pars / Let’s Talk About Love lors de la finale de La Voix la semaine dernière, une version bilingue d’une chanson anglophone de Céline Dion.
Et pourtant, elle l’a chanté avec son accent Franco-Ontarien, un geste audacieux et magnifique, «un espoir pour le français en Ontario» à une époque où la francophonie canadienne est en pleine lutte pour sa survie, confrontée à la cruelle réalité d’un dividende démographique en baisse et à la folklorisation de notre langue et de nos cultures.
Grenier est un triomphe franco-ontarien, notre avenir, une affirmation que Nous sommes, nous serons, comme le veut la devise, et ce, malgré des siècles d’histoire, de lois linguistiques et de discrimination qui ont tenté d’assimiler et d’acculturer les Franco-Canadiens à la majorité anglophone du Canada, particulièrement hors Québec.
«C’est ma langue maternelle», dit Mme Grenier. «C’est la langue de l’amour. Je trouve que les textes de chansons en français, c’est vraiment de la poésie. Je voulais vraiment montrer que je suis francophone, que j’adore la langue française et que je veux la faire survivre».
Tout au long de son parcours à La Voix, Mme Grenier a inspiré les Franco-Ontariens et autres Franco-Canadiens à parler leur français bien à eux avec fierté. Entre eux, avec les autres, avec tout le monde. Elle nous a incités à célébrer la beauté de la langue française.
À l’instar de Céleste Lévis et de Mélissa Ouimet, qui ont ouvert la voie à Mme Grenier sur la scène de La Voix au cours des saisons précédentes, elle est une affirmation culturelle que nous avons encore une voix. Que la prochaine génération de Franco-Ontariens cherche à protéger le fait français en Ontario.
Son premier album, dit Sophie Grenier, sera en français. C’est une promesse, un rappel que les jeunes Franco-Ontariens se battent encore pour leur langue. Et qu’ils revendiqueront leurs accents, leur parler, leur voix.
Isabelle Bourgeault-Tassé est franco-ontarienne. Elle publie à La Tourtière