Parmi les nombreux moments qui me reviennent, il y a ce jour où elle a prétendu avoir vu le lapin de Pâques déposer des œufs dans le parc pour de vrai. Ou encore, quand elle a rejeté toute la responsabilité sur un oiseau qui a soi-disant volé sur la table, renversant tout le verre de lait au passage. Ou cette fois, où, d’un air très sérieux, elle affirme : «C’est doudou qui m’a dit que je devais manger tout le chocolat, ce n’est pas ma faute!».
Et si par malchance elle se rendait compte qu’elle n’avait aucun moyen d’échapper à une situation, «Ce n’est pas moi, c’est ma sœur!» et elle se mettait immanquablement à pleurer toutes les larmes de son corps.
En tant qu’adultes, nous voyons souvent le mensonge comme un acte délibéré de tromper ou de cacher la vérité et nous le considérons bien souvent comme quelque chose de négatif. Pourtant, chez les jeunes enfants, il n’y a aucune notion de malveillance. Le mensonge chez les tout-petits est plutôt une manière d’exprimer leur imagination fertile, d’explorer la réalité afin de mieux comprendre le monde qui les entoure.
Avez-vous déjà remarqué que, lorsque vous demandez à un groupe de jeunes enfants ce qu’ils ont fait pendant la fin de semaine, si l’un d’entre eux mentionne avoir visité les chutes Niagara, les suivants prétendent également y être allés?
Les raisons derrière ce comportement sont multiples; entre autres leur besoin naturel d’imiter leurs pairs, leur désir d’appartenir au groupe, leur volonté de partager des expériences ainsi que leur difficulté à distinguer le réel de l’imaginaire à un si jeune âge. Ils répètent donc ce que les amis racontent, sans mauvaises intentions. Pour eux, il est bien plus amusant de prétendre avoir visité les chutes Niagara que de reconnaitre d’avoir passé la fin de semaine à regarder la télévision.
Il existe beaucoup d’autres formes de mensonges chez les enfants. Parfois, ils inventent des histoires incroyables pour impressionner leurs amis :
– «Ma maman, elle est policière.»
– «Eh bien moi, ma maman, elle est pompière.»
– «Et moi, en fait, elle est présidente!»
Dans certains cas, ils peuvent nier avoir mangé le dernier biscuit dans le pot, même si les miettes autour de leur bouche disent le contraire. Les enfants utilisent souvent le mensonge comme un moyen de se sentir en contrôle de leur environnement, même si cela signifie s’aventurer dans le monde de l’imaginaire.
Transmettre des messages
Maintenant, en tant que parents ou professionnels en petite enfance, comment devrions-nous réagir face à ces petits mensonges?
D’abord, il est essentiel de comprendre que le mensonge chez les enfants est une étape naturelle de leur développement. C’est une phase que traversent la plupart des enfants à un moment donné.
Au lieu de se sentir exaspéré ou de s’énerver, il est plus constructif de profiter de ces moments pour transmettre des messages sur l’honnêteté et ainsi, construire une relation basée sur la confiance. Peut-être que la fable de l’enfant qui criait au loup peut être un bon départ pour aborder ce sujet, si vous avez affaire à un enfant qui abuse de l’art du mensonge.
Voici quelques pistes de réflexion pour comprendre et soutenir l’imagination de l’enfant tout en encourageant la vérité lorsque c’est nécessaire :
- Commençons par les écouter attentivement : Accordons-nous le temps d’avoir une oreille attentive aux histoires des enfants, démontrons-leur un réel intérêt. Posons des questions pour plonger dans leur univers imaginaire.
- Respectons leur créativité : Célébrons et encourageons l’imagination des enfants en exprimant de l’enthousiasme pour leurs histoires inventées. Cela renforcera leur confiance en eux sans freiner leur créativité.
- Enseignons la différence entre l’imagination et le mensonge : Faisons preuve de douceur en expliquant la différence entre le jeu créatif et la réalité.
- Favorisons la vérité : Lorsque la situation nécessite la vérité, expliquons pourquoi il est important de dire la vérité dans des circonstances particulières, notamment, en ce qui concerne la sécurité et les relations de confiance. Cela va dans les deux sens, si l’on veut que l’enfant ait confiance en nous, ne lui tendons pas des pièges pour voir s’il a encore menti.
N’oublions pas que notre rôle consiste à guider nos enfants vers la vérité tout en leur montrant que nous sommes là pour les soutenir, quelles que soient leurs erreurs. Après tout, ces petites histoires imaginaires reflètent leur curiosité et leur désir de grandir et d’apprendre. En tenant compte de ces aspects, nous pouvons aider nos enfants à grandir de manière saine et équilibrée, en développant leur créativité tout en cultivant des valeurs importantes comme l’honnêteté et la bienveillance. Nous pouvons tirer de grandes leçons de ces petits mensonges.
Pour aller plus loin rechercher les livre Le Garçon qui criait au loup ou consulter le texte Le mensonge chez l’enfant ou le livre Le mensonge chez les enfants de Nancy Doyon.