Le gouvernement fédéral a de nouveau pioché dans son enveloppe de 121,3 millions $ promise en 2021 aux établissements postsecondaires francophones. Cette fois, la somme de 5,3 millions $, annoncée le 27 février, vise à financer deux projets sur trois ans, à l’Université de Saint-Boniface (USB) à Winnipeg, au Manitoba.
Le premier projet concerne la mise en service d’un nouveau logiciel en français, afin d’assurer une meilleure gestion des inscriptions des étudiants. Le second devrait permettre à l’établissement d’améliorer son image pour recruter de nouveaux élèves, notamment grâce à une communication modernisée.
Cette nouvelle s’inscrit dans une série d’annonces similaires du gouvernement fédéral à l’échelle nationale ces derniers mois.
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Patrimoine canadien (PCH) explique avoir lancé des appels en 2021-2022 et en 2022-2023 auprès des gouvernements provinciaux et territoriaux, pour financer des projets dans le secteur de l’éducation postsecondaire dans la langue de la minorité.
Dans un courriel adressé à Francopresse, PCH confirme qu’il a dépensé jusqu’à présent 90 678 587 $ sur trois ans pour 37 projets liés au postsecondaire en français. Plus de 30 millions $ sont encore disponibles, jusqu’à l’expiration de l’enveloppe totale de 121,3 millions $, le 31 mars 2024.
Toutes les demandes de financement reçues par Patrimoine canadien ont été évaluées selon «le mérite, en fonction de critères d’évaluation précis et du montant demandé par les établissements», affirme David Larose, responsable des relations avec les médias à Patrimoine canadien.
D’autres établissements ont par ailleurs reçu des fonds en 2022 grâce à cette même enveloppe, «mais les sommes n’ont pas été formellement annoncées à travers un communiqué de presse».
D’autres annonces visant à appuyer le postsecondaire en milieu minoritaire devraient tomber en 2023-2024.
D’autres établissements concernés
En juin 2022, le Campus Saint-Jean de l’Université de l’Alberta a reçu près de 13,3 millions $ sur trois ans, dont 10 millions $ de la part du gouvernement fédéral.
L’investissement avait soulagé l’établissement, sans être la solution, selon l’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA). Pierre Asselin, alors vice-président de l’organisme, avait confié au journal Le Franco «la solution qui est proposée n’est pas une solution permanente».
Pour se sortir de sa situation précaire, l’Université de Sudbury a de son côté émis deux recommandations fin janvier, lors des consultations prébudgétaires de l’Ontario. L’établissement a reçu l’an dernier près de 2 millions $ de la part du fédéral.
Les deux établissements n’ont pas donné suite aux demandes d’entrevue de Francopresse.
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Financement de projets urgents
Néanmoins, les 121,3 millions $ promis par le fédéral n’ont jamais été destinés à financer des projets à long terme, rappelle le directeur de la recherche stratégique et des relations internationales à l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC), Martin Normand. «C’est une façon de répondre aux besoins ponctuels et urgents des établissements», appuie-t-il.
Certains ont par exemple reçu des financements pour développer leur système informatique. «Remplacer un parc informatique coute extrêmement cher, note Martin Normand. Dans certains cas [cette aide] peut avoir une incidence sur tout le fonctionnement de l’établissement. Ça ne règle pas tous les problèmes de financement, mais ça vient enlever une certaine pression quand des besoins urgents peuvent être résolus.»
Le recteur de l’Université de Moncton, Denis Prud’homme, confirme : «L’appui de 18,5 millions $ que nous avons reçu l’an dernier [27,8 millions $ au total avec l’ajout provincial, NDLR] nous permet de faire du rattrapage. Ça a été un appui énorme pour des investissements qu’on ne pouvait pas se permettre de faire avant. Et ç’a aidé à la stabilisation des finances de l’université.»
Le rattrapage concerne notamment les technologies de l’université néobrunswickoise, autant au sein de son administration que pour le matériel proposé aux étudiants. Un aspect sur lequel l’établissement accuse encore un retard important.
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Refusant de citer des chiffres précis, le recteur fait remarquer que l’Université de Moncton n’est «pas vraiment dans une situation de déficit, mais dans un objectif de rattrapage» et que malgré le «gros appui» reçu en 2022, il souhaite que l’aide fédérale continue, pour stabiliser certains programmes de financement de langue officielle «qui n’ont pas été bonifiés» ni «ajustés sur l’inflation».
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Denis Prud’homme précise qu’il s’agit de programmes qui permettraient l’enseignement du français et de l’anglais langue seconde, ainsi que l’aide pour le développement de la recherche en français, l’ajout de livres en français pour la bibliothèque et des bourses pour les étudiants.
80 millions $ attendus dans le prochain budget fédéral
Avec un budget fédéral qui devrait tomber dans les prochaines semaines, Martin Normand rappelle que l’ACUFC attend que le gouvernement rende l’enveloppe de 80 millions $ promise par les libéraux permanente, afin d’appuyer les établissements postsecondaires des communautés de langue officielle en situation minoritaire au Canada.
L’ACUFC a réitéré sa demande de voir cette enveloppe inscrite dans le budget fédéral ainsi que dans le Plan d’action pour les langues officielles, prévus dans les prochaines semaines.
«On veut s’assurer que ce fonds permette aux établissements de proposer des projets capables de stabiliser sur le long terme», indique Martin Normand.
Denis Prud’homme souligne de son côté que si cet appui financier de 80 millions $ est maintenu, son établissement pourra songer à investir dans les programmes en français ainsi que dans la rénovation verte des infrastructures vieillissantes.