Jean-Michel Chabot n’a jamais fait de compost, mais il compte bien se faire un potager. L’aspect technologique du FoodCycler l’a motivé à aller chercher un appareil à la Ville. Après une semaine d’utilisation, il prend lentement l’habitude de détourner les restes de table de la poubelle vers l’appareil et a mené quelques cycles de déshydratation.
Chez Albena Liebigt, à Hornepayne, l’habitude est maintenant ancrée. C’est elle qui, en 2022, a géré le projet pour une trentaine de foyers à Hornepayne. Pour quelques participants, l’attrait de la nouveauté a perdu du lustre et ils l’utilisent moins régulièrement, a-t-elle observé.
Elle, par contre, l’utilise encore presque tous les jours. «Ça a éliminé mes sacs de déchets. Nous en sommes à un par semaine», dit-elle. Avant, son mari et elle en produisaient de 4 à 7 — Hornepayne n’a pas de programme de recyclage, précise-t-elle.
À Hearst, l’idée de mener un tel projet pilote a été présentée au conseil municipal le printemps dernier, rappelle le directeur des travaux publics et services d’ingénierie, Luc Léonard. «La Ville a toujours encouragé ce genre d’initiative, dit-il. Les matières organiques représentent de 25 à 50 % des déchets ménagers.»
Du dépotoir au potager
«Ça crée du méthane», poursuit Luc Léonard.
Grâce au programme, une portion des matières organiques restent chez le citoyen, ce qui représente une réduction 393 kg de CO2 par foyer par année, selon l’entreprise ottavienne Food Cycle Science.
d’enfouissement, comme en témoigne l’expérience d’Albena Liebigt à Hornepayne.
«Il y a une crise de capacité des sites d’enfouissements, explique la responsable des solutions municipales chez Food Cycle Science, Christina Zardo. […] Comme les déchets alimentaires forment la catégorie la plus importante de matières qui se retrouvent au dépotoir, c’est la stratégie la plus efficace pour résoudre cette crise», fait-elle valoir.
À Bonfield, au cours des 12 semaines d’analyse, une obligation du programme, 88 % des participants ont réduit leurs ordures d’un sac par semaine et plus de la moitié des participants de plus de deux sacs. Plus de quatre participants sur cinq ont aussi dit qu’ils préfèreraient l’utilisation d’un appareil maison à un programme municipal de compostage.
Avantages et inconvénients
En vertu du programme, les citoyens achètent un appareil à prix réduit (150 $ ou 300 $ selon la capacité de l’appareil plutôt que 500 ou 800 $) grâce à des programmes de subvention offerts par la Ville et des organismes. Une autre réduction de 200 à 250 $ qu’applique l’entreprise Food Cycle Science, qui produit les appareils, s’ajoute. En retour, les participants doivent documenter leur utilisation pendant 12 semaines.
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«On y met les coquilles d’œuf, le marc de café, les os de poulet. Ça se remplit très vite», explique Albena Liebigt.
Jean-Michel Chabot abonde. Les deux utilisent le plus petit des appareils, avec une capacité de 2,5 litres.
Avec de jeunes enfants à la maison, les pertes alimentaires sont importantes chez lui et les odeurs qui émanent des poubelles sont dérangeantes. «Ça ne sent pas, c’est silencieux. Mais ça prend de la place, évalue-t-il. Il faut juste s’habituer à ne pas jeter les restes aux poubelles.»
L’appareil FoodCycler déshydrate et pulvérise les restes alimentaires — des pelures aux os — et les transforme en amendement compostable. Les restes sont ainsi réduits en volume de 90 %.
Elsa St-Onge, une Hearstéenne qui utilise ce genre d’appareil depuis quelque temps déjà, apporte une nuance. Le FoodCycler n’est pas une machine à produire du compost, à proprement parler. «C’est une machine qui déshydrate et qui broie. Ça fait des petits morceaux secs. La déshydratation fait en sorte qu’on peut le conserver dans la maison et le broyage fait que ça se décompose très rapidement dans la terre.»
Et l’amendement ainsi produit a des effets miraculeux, aux dires d’Albena Liebigt : «Vous devriez voir mes violettes africaines! Vous n’y croiriez pas, lance-t-elle, enthousiaste. Des gens viennent les prendre en photo.»
Solution ou markéting?
En 2020, l’entreprise Food Cycle Science a reçu des fonds du programme Défi de réduction du gaspillage alimentaire du ministère canadien de l’Agriculture, qui lui permet de s’associer à des municipalités petites, rurales, du nord et les communautés autochtones pour réduire l’enfouissement de déchets alimentaires par le moyen de leur produit FoodCycler.
«L’objectif n’est PAS de commercialiser notre produit», soutient la responsable des solutions municipales chez Food Cycle Science, Christina Zardo. «D’autres partenaires et divisions de l’entreprise sont responsables de la commercialisation.» Elle explique que sa division a pour mandat de fournir des solutions aux municipalités pour réduire le volume de déchets alimentaires envoyés dans les dépotoirs et d’ainsi en accroitre la durée de vie, de réduire les émissions de méthane et de trouver une alternative aux programmes de collecte des matières organiques, souvent dispendieux.
«On a besoin d’une combinaison de solutions, estime Elsa St-Onge. C’est beau avoir un FoodCycler, mais pourquoi quelqu’un qui n’a pas de jardin ferait ça? C’est une partie de la solution, mais pas la seule. C’est important que les villes aient des programmes de compostage», conclut-elle.