Michel Lapierre a acheté sa maison sur la rue Dearbourne, dans le quartier du Nouveau Sudbury, il y a près de quarante ans. «C’était alors un très beau coin avec des maisons relativement neuves et de beaux frênes que la Ville avait plantés tout le long de la rue», dit-il.
Aujourd’hui, tous ces arbres sont morts ou en train de mourir. Selon M. Lapierre et ses quelques voisins qui ont parlé au Voyageur, certains de ces arbres sont en tellement mauvaise condition qu’ils constituent un danger. «Quand on appelle la Ville pour les alerter sur situation, on nous dit que notre adresse sera placée sur une liste d’attente et, dit M. Lapierre, ça fait plusieurs années qu’on appelle».
Le responsable de cette destruction est un coléoptère dévastateur appelé l’agrile du frêne, qui a fait son apparition en Ontario vers la fin des années ‘90s. L’insecte a déjà détruit des millions d’arbres en Amérique du Nord et cause maintenant de sérieux problèmes à la Ville du Grand Sudbury.
Dans les années ‘70s et ‘80s, la municipalité a planté des milliers de frênes pour reverdir et embellir de nombreux quartiers en construction ainsi que certaines propriétés municipales. Selon le professeur de foresterie au Collège Boréal, Marc Hébert, «on a choisi cette espèce parce qu’elle est tolérante au sel qu’on mettait sur nos routes en ce temps-là. On en voit plusieurs devant les maisons et le long des rues de Sudbury».
Tout a commencé en 2015
Mais il n’y a pas que la Ville qui a planté des frênes. Plusieurs institutions, commerces et propriétaires résidentiels en ont aussi planté. C’est ainsi qu’en septembre dernier, un des étudiants du professeur Hébert a découvert un agrile près de la serre du collège. Après vérification, il est apparu que tous les frênes étaient infestés. «Immédiatement, le collège a dû couper et déchiqueter (chip) plus de 40 frênes sur son campus», explique M. Hébert.
La responsabilité de la municipalité est cependant beaucoup plus grande. La Ville a découvert l’infestation lorsque les insectes sont arrivés à Sudbury en 2015. Le service de foresterie de la ville estimait alors que quelque 1 200 arbres plantés par la municipalité avaient été attaqués. Les forestiers en ont abattu 200 depuis quelques années, mais l’infestation continue de se répandre.
Le gestionnaire des services d’infrastructure du Grand Sudbury, Dan Thibeault, indique que la Ville a adopté un programme et un budget pour l’abattage des frênes, mais il ajoute que tout ça risque de changer puisque la Ville veut accélérer le programme.
«Nous avons un programme de quatre ans pour éliminer ces arbres, mais nous examinons présentement différents moyens, notamment demander des soumissions de différents professionnels, pour accélérer l’abattage». M. Thibeault explique que le nombre d’arbres infestés a augmenté depuis l’automne dernier et la Ville n’a que deux équipes de forestiers dédiés à l’abattage. Elle veut de l’aide.
Les gestes à éviter
Le Professeur Hébert met cependant en garde les résidents qui voudraient «aider» la Ville en coupant ces arbres eux-mêmes. «D’abord, dit-il, les règlements municipaux interdisent aux citoyens de couper des arbres qui appartiennent à la Ville». Il ajoute qu’il est aussi très important de ne pas débiter ses propres frênes et de les apporter au chalet pour des feux de camps. «Cela ne fait que répandre l’infestation à la forêt autour de votre chalet». Il affirme qu’il faut absolument déchiqueter les arbres abattus.
De plus, afin de contrôler l’infestation de l’agrile du frêne, l’Agence d’inspection du gouvernement fédéral a identifié la grande région de Sudbury comme une zone à risque où «…si vous déplacez ces produits potentiellement infestés … hors des zones contrôlées sans notre accord, vous risquez une amende ou des poursuites judiciaires.»