Le gouvernement de Doug Ford a inclus la modernisation de la Loi sur les Services en français dans le projet de loi omnibus du minibudget déposé le 4 novembre. Il dit oui à l’offre active, mais pas au retour du poste indépendant de Commissaire aux services en français ni à l’abolition des 26 régions désignées.
La mise à jour économique du gouvernement Ford permet la modification d’une vingtaine de lois, dont la Loi 8 vieille de plus de 30 ans et qui encadre les droits de la communauté francophone de la province.
En déposant son minibudget, le gouvernement Ford a dit reconnaitre l’importance d’une main-d’œuvre francophone et bilingue «solide» et que la modernisation de la Loi sur les services en français permettra de le confirmer.
Dans sa réforme, attendue depuis son élection, la ministre des Affaires francophones, Caroline Mulroney, promet la mise en place du concept de l’offre active, qui forcerait les ministères et les organismes désignés à faire la promotion des services en français et de s’assurer que les utilisateurs francophones s’en servent.
Elle comprendra aussi un article pour examiner l’application de la loi tous les dix ans.
Il y a deux semaines, un politicien de l’opposition avait dit au Voyageur craindre que le projet de loi ne soit déposé qu’à l’approche des élections de juin. Un sentiment qui était partagé par la professeure adjointe du département de science politique de l’Université Queen’s, Stéphanie Chouinard. Elle est heureuse de voir que le projet de loi a été déposé plus tôt.
Elle croit qu’il a été inclus dans un projet omnibus «parce [que le gouvernement] manque de temps». Il n’y aura pas beaucoup de jours en chambre avant les prochaines élections pour adopter des lois selon elle. Cela limite aussi les temps des débats pour chaque projet de loi inclus dans le projet de loi omnibus.
De plus, la manœuvre met l’opposition dans une position délicate. Le Nouveau Parti démocratique et le Parti libéral de l’Ontario pourraient vouloir voter contre le budget ou d’autres projets de loi, mais ils devront en même temps voter contre la modernisation et répondre aux questions des électeurs franco-ontariens. Quoique l’opposition peut critiquer ce qu’il manque dans le projet de loi.
«Il y a quand même un certain nombre de demandes de la part de la communauté qui ont été entendues dans ce que l’on voit. Notamment en matière d’offre active. C’est un élément qui était important», explique la professeure.
Elle ajoute que la loi ajoute une désignation bilingue du poste de l’ombudsman. «Ça va sous le sens puisque les services en français, c’est maintenant sous l’égide de l’ombudsman.»
Commissaire ou ombudsman?
Malgré ce point positif, elle rappelle que l’une des principales demandes de la communauté franco-ontarienne était le retour de l’indépendance du Commissaire aux services en français.
«J’avais un espoir que l’on revienne sur la décision du Jeudi noir, mais ce n’est pas le cas», dit Stéphanie Chouinard.
La ministre Mulroney soutient que le pouvoir d’enquête du commissariat est renforcé au sein du bureau de l’ombudsman. C’est peut-être vrai, mais le problème n’est pas là, rappelle Stéphanie Chouinard.
«C’est tout le travail proactif que le Commissariat aux services en français faisait pour justement s’assurer que le gouvernement soit bien outillé, qu’il prenne de bonnes décisions en amont pour la communauté franco-ontarienne, plutôt que d’être réactif et de devoir corrigé le tir après que des plaintes soient faites.»
Régions désignées
La ministre des Affaires francophones n’a pas non plus éradiqué le concept des régions désignées, une réforme largement demandée par la communauté francophone qui aurait garanti l’accès aux services en français à travers la province au complet, plutôt que seulement dans les 26 régions désignées actuelles.
En réponse aux questions des médias, la ministre avance qu’il serait en ce moment impossible de trouver de la main-d’œuvre francophone dans toutes les régions de la province. Elle préfère donc être «réaliste» et approcher le problème autrement.
D’un côté, dit-elle, la ministre affirme que la province et la population ne sont pas prêtes à avoir une seule région désignée : tout l’Ontario. De l’autre, elle ne se dépêche pas pour mettre en place des solutions à ce manque de main-d’œuvre annoncé. Comme le financement de l’Université de Sudbury «qui attend depuis des mois et des mois des réponses sur du financement; mais le gouvernement se cache derrière le processus de la [Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies] qui pourrait ne pas prendre fin avant plusieurs mois encore».