Maha Nasr a posé ses valises à Kirkland Lake à l’hiver 2017, accompagnée de sa fille Lilac âgée alors de 5 ans. La jeune femme d’origine libanaise était venue rejoindre son époux, Valid Abu Ammar, un cadre dirigeant dans le secteur des mines. Lui aussi est originaire de ce pays appelé, à juste titre, la perle du Levant.
«Pas question de rester dans ce coin-ci», lui lança-t-elle à l’époque. Maha Nasr, qui a grandi proche d’une côte méditerranéenne où les températures peuvent être favorables à la baignade en novembre, était effrayée par la neige. Il faut dire aussi qu’elle était habituée à un certain niveau de vie durant les missions prolongées de son époux qu’elle accompagnait à travers le monde. Les sorties dans des restaurants branchés et les virées dans de grandes surfaces de magasinage et de loisirs meublaient jusqu’alors son quotidien.
Mais Maha allait apprendre à vivre autrement. Chaleureuse et accueillante, la communauté de Kirkland Lake lui a rendu l’hiver plus tolérable. Le couple Rose-Lyne d’Aoust Messier et Jean-Marie Messier l’ont accueilli à bras le corps, le temps que la famille, qui attendait une nouvelle naissance, trouve une maison.
«Rose-Lyne m’a beaucoup aidé, notamment lors de la venue au monde de ma deuxième fille, Meral. Jean-Marie, qui est aujourd’hui un très bon ami, a été comme un père pour moi», témoigne-t-elle.
Le Groupe multiculturel de Kirkland Lake a fait le reste. Ils lui ont ouvert grandes les portes de son local en plein cœur du centre-ville. Le vendredi 17 novembre, Maha Nasr a témoigné de sa reconnaissance à sa nouvelle communauté en préparant, à sa charge, un fastidieux souper libanais.
KLMG, qui vient de lancer un concept communautaire où, à chaque mois, un groupe ou une personne présente sa culture et son pays d’origine, fait cotiser ses membres pour le financement de ces soirées.
«J’ai refusé. Nos us et coutumes en termes d’hospitalité nous interdisent d’accepter de l’argent ou des contributions lorsque nous préparons à manger pour des invités. Je préfère voir les cotisations aller dans les caisses de KLMG», lance fièrement Maha Nasr.
Des mets gourmands
La cinquantaine de participantes et participants ont raffolé du kébab et du houmous libanais et d’une gourmande pâtisserie orientale traditionnelle, comme les ketaef, maamouls et namoura, un délicieux gâteau à base de semoule.
Blaine Clowater est installé à Kirkland-Lake depuis 2006. Il vient de Rouyn-Noranda, au Québec. Il n’a eu de bons mots que pour la cuisine de Maha Nasr. «La nourriture était très bonne. C’est bien aussi de pouvoir sortir à Kirkland Lake et d’apprendre sur une nouvelle culture», souligne-t-il.
Mme Nasr a aussi diffusé un film de son mariage au Liban, sous le regard ébahi de l’assistance. Linda Järv, une Franco-Ontarienne qui a épousé la culture estonienne de son mari Jaak Järv, n’en revenait pas. «Cinq jours et cinq nuits de célébrations pour un mariage! Jamais vu ça de ma vie! J’irai visiter le Liban et assister à une fête de mariage locale aussitôt que la paix est de retour dans la région», affirme-t-elle en référence au conflit israélo-palestinien actuel.
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Fières des anciennes et nouvelles racines
Anna McPherson était très contente de voir Maha Nasr présenter avec «aisance» et «assurance» sa culture devant les membres de KLMG. «Ce qui m’a le plus touchée, c’était de voir la fierté qui se dégageait des yeux de sa fille Lilac, en observant sa maman présenter à nos membres la culture de ses aïeux. C’était beau à voir à», relève-t-elle.
Anna McPherson préside l’association depuis 2016 — quatre ans après son arrivée avec sa famille à Kirkland Lake. Elle aussi avait été accueillie à bras ouverts. D’où son dévouement aujourd’hui pour KLMG. «C’était inespéré pour moi et pour ma famille d’être accueillis, à notre arrivée, par toute une communauté, alors que nous ne connaissions personne», témoigne-t-elle.
Mme McPherson est fière de diriger un groupe qui compte plus de 450 adhérents sur sa page Facebook et dont les portraits de 57 membres aux nationalités différentes ornent les murs de son local. Ils viennent de l’Uruguay, de Macédoine, de Tanzanie, de Hongrie, du Chili, de Thaïlande, du Pakistan, de l’Afrique du Sud, de la République dominicaine, de Cuba… pour ne citer que ceux-là.
De nouvelles arrivantes
Shraddha Shrestha est du Népal et Poonnam Poonam est de l’Inde. Les deux étudiantes sont arrivées au Canada, directement à Kirkland Lake, il y a à peine trois mois, pour suivre un cursus de gestion en soins de santé (health care management) au collège Northern.
Barbara Kiely, une Franco-Ontarienne de Kirkland Lake, les a invités à se joindre au Groupe et à participer à la soirée.
Shraddha Shrestha ne connaissait rien du Liban ni de sa population. Poonnam Poonam a pris connaissance de l’existence de ce pays lors des explosions au port de Beyrouth en aout 2020.
Les deux amies étaient ravies de découvrir que, comme dans leurs pays, les fêtes de mariage se célébraient pendant plusieurs jours. Elles disent se sentir désormais plus proches de ce pays, dont la gastronomie ne leur est pas si étrangère, puisqu’elles y ont trouvé des similitudes.
Très discrets pendant la soirée, le couple Rose-Lyne d’Aoust Messier et Jean-Marie Messier ont fait le déplacement depuis Sudbury pour assister à la soirée. Le couple est, en effet, installé depuis 2021 dans la ville du nickel pour se rapprocher de ses enfants.
«C’était important pour nous, car nous avons tissé des liens avec cette famille libanaise. Nous avons toujours appuyé KLMG, car nous savons que la vitalité d’une communauté se mesure dans la façon qu’elle accueille les nouveaux venus, que ce soit des Canadiens de souche, des nouveaux arrivants ou des réfugiés. Même après avoir quitté Kirkland Lake, nous nous sentons encore reliés à cette communauté et notre famille élargie se trouve aussi là-bas», notent Rose-Lyne d’Aoust Messier et Jean-Marie Messier.
Le couple a été tout aussi marqué par la présentation de Maha. «Elle était fière de son pays, même si elle a vécu des moments d’horreur dans le passé concernant la guerre et l’impact de la crise économique sur sa famille. Elle a su nous faire voir la face cachée du Liban, ses paysages magnifiques, son histoire, sa culture et son architecture», ajoute-t-il.
Voir une mère faire preuve de «résilience» et de «courage», en parlant «dans une langue seconde au sujet de son pays et de ses coutumes», sous le regard admiratif de sa fille, a aussi beaucoup touché le couple.