L’écrivaine, poète et artiste interdisciplinaire est accompagnée sur la scène de la Grande salle de la Place des arts du Grand Sudbury, par Manuel Gasse, multiinstrumentiste, auteur-compositeur-interprète, qui, lui, est originaire de Havre-Saint-Pierre, situé un peu plus loin sur la route 138 de la Côte-Nord.
Son spectacle de slam, de poésie et de chansons Nui Pimenten – Je veux marcher, ce veut un voyage poétique qui nous transporte sur le territoire qui nous porte tous. «Territoire, terri-terre, terri-mère» ses jeux de mots qui définissent bien la vision autochtone et l’importance d’être lié à la terre.
«Je marche, j’avance, je cours (…) Je veux marcher avec mes ancêtres et avec la prochaine génération», souffle-t-elle dans la salle.
Cette soirée envoûtante, bercée par les aurores boréales qui irradient le ciel Sudburois en ce vendredi du 10 mai, se veut une ode au voyage intérieur où la poésie devient une prière, qu’elle soit récitée ou chantée. Qu’elle soit en langue Innu, en français ou en anglais.
Natasha nous charme par ses gestes fluides qui accompagnent ses paroles, lui donnant tantôt l’apparence d’un aigle qui déplie ses ailes, et dans un autre instant, les gestes sensuels d’une danseuse de flamenco.
Un message universel
Non seulement sommes-nous transportés par sa poésie, mais aussi par son authenticité, sa fragilité et sa franchise. Elle nous partage sa peine d’avoir perdu un être cher, une perte causée par les effets d’une addiction. On ne mesure pas l’ampleur de la souffrance d’une personne, dit-elle. Comme ceux des enfants des «p’tites écoles», en référence aux pensionnats, qui «ne sont jamais devenus des adultes», lâche-t-elle.
Son message est universel et parle aussi des autres peuples autochtones qu’elle a croisé lors de ses nombreux voyages à l’international. Tous ont subi une dépossession de leurs terres et sont en quête de retrouver ce lien à la terre. «Where can I bury my blood if I have no land», un texte inspiré d’un voyage récent en Nouvelle-Zélande est évocateur de cet enjeu de déconstruire le colonialisme.
Lors d’un entretien avec Natasha Kanape Fontaine, après son spectacle, nous avons évoqué le pouvoir de la poésie et comment elle peut créer des ponts en mettant en relation le monde intérieur et extérieur. Elle a aussi parlé du fait qu’elle a une responsabilité de partager et de transmettre à la prochaine génération ce qu’elle a reçu de ses grands-parents paternels et maternels. Ceux-ci étaient chasseurs et pêcheurs. Son grand-père Shushepshak, de son vrai nom Joseph-Jacques Fontaine, l’a beaucoup influencé, en l’initiant à la chasse, aux coutumes et à la langue Innu. Un homme respecté par les gens du village qui le consultaient pour interpréter leurs rêves. Ce don que Natasha semble avoir hérité.