Des représentants d’universités et de collèges de langue française ont témoigné le 11 avril devant le Comité permanent des langues officielles. Le financement fédéral des établissements postsecondaires francophones en situation minoritaire était à l’ordre du jour.
«Il faut que le règlement [de la Loi] nous permette de préciser comment le fédéral peut intervenir dans des domaines de compétences provinciales sans que ça vienne créer de nouveaux conflits. On veut que la part de responsabilité du fédéral soit claire», a insisté Martin Normand, directeur de la recherche stratégique à l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC), devant le Comité.
«Dans la nouvelle Loi sur les langues officielles, le gouvernement fédéral s’attribue une responsabilité d’agir pour la présence d’établissements postsecondaires forts dans les communautés francophones en situation minoritaire au pays», a-t-il signalé.
C’est d’ailleurs dans cet esprit que, trois jours plus tôt, il annonçait au Comité sénatorial permanent des langues officielles que l’ACUFC avait déposé une plainte auprès du Commissariat aux langues officielles pour contester la décision du ministre fédéral de l’Immigration, Marc Miller, de plafonner le nombre de permis d’étude aux étudiants étrangers.
Selon les plaignants, cette décision ne tient pas compte de l’impact sur les établissements francophones.
Depuis, le gouvernement a précisé la répartition des permis d’études entre les provinces et les territoires. Les places ont été attribuées afin de ne pas nuire à la croissance démographique des provinces. Certaines provinces, comme le Nouveau-Brunswick, pourront en accueillir plus qu’en 2023.
La question des champs de compétences
Martin Normand a ainsi rappelé que des éléments de la (LLO), en particulier le paragraphe 41, font en sorte que les institutions postsecondaires francophones en situation minoritaire sont en partie une responsabilité fédérale.
«Dans le paragraphe 41.3 de la loi, le gouvernement fédéral s’engage à renforcer les possibilités pour les minorités francophones de faire des apprentissages de qualité dans leur propre langue tout au long de leur vie, depuis la petite enfance jusqu’au postsecondaire», a-t-il argüé devant le Comité.
«Le paragraphe 41.6, poursuit-il, précise même que l’éducation est l’un des secteurs essentiels de l’épanouissement des minorités francophones.»
Martin Normand indique toutefois que la distinction entre les compétences provinciales et fédérales dans la LLO n’est pas suffisamment précisée, créant parfois des confusions dans l’interprétation de la loi.
Financement insuffisant
«Les investissements fédéraux nous permettent de maintenir des frais de scolarité compétitifs», a reconnu Gabriel Cormier, vice-recteur à l’administration et aux ressources humaines de l’Université de Moncton, devant le Comité. «Mais ce financement devrait être indexé», a-t-il prévenu.
Par exemple, le financement annuel que reçoit l’Université de Moncton à travers le Programme de langues officielles en éducation de Patrimoine canadien n’a pas été indexé aux coûts de la vie depuis 2002.
Selon le vice-recteur, ce financement représentait à l’époque environ 4,9 millions de dollars, soit 5,5 % des revenus de l’Université, contre 2,5 % aujourd’hui.
S’il avait été indexé, il atteindrait 7,9 millions. Le manque à gagner s’élève donc à 3 millions.
Gabriel Cormier a également martelé que les infrastructures coûtent cher aux établissements. «La plupart des édifices de l’Université ont été conçus dans les années 1960 et 1970 et arrivent à un cycle majeur de rénovation.»
Le financement permet également aux établissements d’offrir des programmes qui attirent les étudiants, affirme Martin Normand. «Il y a certains programmes qui sont moins présents dans notre réseau d’établissements, dans les STIM [programmes d’études en sciences, technologie, ingénierie et mathématiques, NDLR] par exemple, qui sont des programmes [qui coûtent] très chers à offrir.»