Tout cela a été mis en lumière lors du forum «Les soins de longue durée pour les francophones dans le grand Toronto», organisé le 31 mars au Collège Boréal par l’Entité 3 de planification des soins de santé en français et la Fédération des aînés et des retraités francophones de l’Ontario (FARFO).
235 000 francophones de plus de 50 ans
Dans le Grand Toronto, il y a plus de 235 000 francophones âgés de plus de 50 ans, affirme le président de la FARFO, Jean-Rock Boutin.
«Quand on est malade, on n’est plus bilingue», explique M. Boutin. Plus on avance en âge, plus on recule dans sa langue seconde, l’anglais. C’est pourquoi des soins en français sont très importants.
Un sondage réalisé en avril 2022 par la FARFO montre que la grande majorité des personnes sondées souhaitent rester dans leur communauté. Ils ne «souhaitent pas quitter leurs proches et demandent des soins en français».
Le besoin «d’une place pour tous»
Le forum torontois coïncidait avec la Journée internationale de la visibilité transgenre. Le commissaire par intérim aux services en français de l’Ontario, Carl Bouchard, en a profité pour rappeler que «la diversité nous enrichit».
«Il faut travailler pour que nous puissions, toutes et tous, pouvoir nous reconnaitre dans nos services en français», dit-il.
Le manque de professionnels francophones est aussi un des points marquants de cette journée.
Pour le directeur général de la FARFO, Michel Tremblay, «il faut continuer à travailler avec les différentes universités pour former plus de professionnels, plus de préposés au soin, ou des travailleurs sociaux francophones».
Pénurie matérielle
Cependant, cela ne peut être une solution-miracle, selon lui. «Il ne faut pas que l’on soit détourné de notre objectif, c’est une pénurie générale.»
C’est aussi un élément mis en avant par Constant Ouapo dans sa présentation. À l’échelle de la province, indique le directeur général de l’Entité 3, il y a «un lit pour 170 personnes et un lit désigné pour 3400 francophones».
Le rôle de la province
Citant une étude parue dans le journal de l’Association médicale canadienne, Carl Bouchard explique que «les patients et patientes ayant reçu les soins dans leur première langue ont obtenu de meilleurs résultats à l’hôpital», que des francophones ayant reçu des soins similaires, mais pas en français.
La Commission d’enquête sur la covid dans les foyers de soins de longue durée a finalement répondu positivement aux requêtes de M. Bouchard et de son équipe. La Commission a reconnu que les résidents francophones «doivent recevoir des soins et des services culturellement et linguistiquement appropriés».
Une collaboration nécessaire
La Loi sur les services en français a déjà 37 ans, rappelle Carl Bouchard. Pour vérifier sa bonne application, il est «toujours nécessaire» de travailler en relation avec des organisations comme la FARFO ou les Entités.
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Le Voyageur offre une vue d’ensemble de la francophonie et de la vie dans le Nord-Est de l’Ontario.
Le commissaire estime qu’une activité comme ce forum est «très importante». Cela lui permet d’avoir un retour direct des personnes concernées, ce qui peut l’amener à faire des recommandations au gouvernement.
Directeur aux politiques et aux relations gouvernementales de l’Assemblée de la Francophonie de l’Ontario (AFO), Bryan Michaud explique à l-express.ca que l’AFO collabore régulièrement avec ces organismes. L’AFO et la FARFO ont publié en 2019 un livre blanc sur Le vieillissement des francophones en Ontario.
Pour Michel Tremblay, cette collaboration est primordiale. Aucune de ces organisations ou institution ne peut gérer ce problème de façon autonome. Les diverses Entités, la FARFO, l’AFO et le gouvernement doivent travailler «main dans la main».
Un enjeu préoccupant et d’actualité
Bryan Michaud mentionne que l’AFO observe depuis deux ans, à l’aide d’un sondage annuel, que les questions de santé gagnent de plus en plus d’importance aux yeux des franco-ontariennes et franco-ontariens. «Cela a même doublé au cours de la dernière année.»
Pour Constant Ouapo, le forum ne pouvait pas mieux tomber, tant ce sujet «est d’actualité».
«Le taux de vieillissement est assez important», explique-t-il à l-express.ca. Par conséquent, «dans les prochaines années, il va y avoir une proportion de personnes ainées à prendre en charge de plus en plus importante».
L’organisation de cet évènement vise alors à sensibiliser dans une «démarche proactive». Cela permet de «discuter des problèmes et envisager des solutions avec la communauté».
Un manque d’information
Un des problèmes majeurs mis à l’avant par ce forum, selon Constant Ouapo, est «qu’il y a des services en français existants, mais qui ne sont pas utilisés».
Ce serait la conséquence d’un manque d’information, autant du côté des patients que des professionnels de santé.
Constant Ouapo demande simplement au gouvernement de l’Ontario «d’appliquer la loi sur les services en français» qui demande aux ministères et agences provinciales de promouvoir «l’offre active» de leurs services en français – c’est-à-dire les proposer aux usager plutôt que d’attendre qu’ils en fassent la demande.
Michel Tremblay indique que ce forum est né d’une discussion entre Constant Ouapo et lui-même. Ils se sont en effet rendu compte qu’ils n’avaient pas les mêmes informations sur la réalité de la situation. «On a alors compris qu’il était important de travailler ensemble, pour découvrir et agir», affirme-t-il.
Il est évident qu’il y a encore du travail pour garantir aux francophones l’accès à des soins de longue durée dans leur langue.
Si certaines initiatives sont mises en place, comme au Centres d’accueil Héritage, du côté de la Communauté du Trille Blanc, ou par le Centre francophone du Grand Toronto, le manque de sensibilisation de la population à ces questions semble être une problématique majeure.