Les fondateurs du Mouvement pour l’inclusion des communautés racisées de l’Ontario (MICRO) ont un double objectif : «Nous voulons outiller les parents et faire d’eux des passeurs culturels pour qu’ils puissent se reconnecter à leur culture, dans le but de la partager et la transmettre à leurs enfants. Nous voulons également démontrer que les jeunes qui ont un ancrage solide de leur conscience historique et culturelle sont moins déstabilisés par la discrimination ou par le racisme. Ils peuvent confronter, sans émotion, mais plutôt avec des arguments, les situations et les propos haineux », fait savoir la coordonnatrice du projet Connexions culturelles, Elykiah Doumbe.
Elle explique que les études prouvent que les jeunes qui ont un ancrage dans leur identité culturelle développent une fierté, une estime de soi, le sentiment de «je suis valable» et de «je suis capable». Ils s’inscrivent ainsi dans une perspective de réussite, renforce Mme Doumbe.
Assis entre deux chaises
Entre les afrodescendants et leur continent d’origine, Elykiah Doumbe remarque un manque. «On n’a pas fait un sondage en tant que tel, mais de l’observation autour de nous, on remarque que nous sommes relativement déconnectés de nous-mêmes et ça fait qu’on est un petit peu assis sur deux chaises. On ne sait pas trop comment ça commence, comment se définir et ça nous crée d’être dans une situation inconfortable.»
Le MICRO voudrait alors que ces afrodescendants s’affirment dans leur environnement, décident de ce qu’ils peuvent prendre ou pas de cet environnement. Le mouvement aimerait qu’ils fassent des choix qui permettent de les construire, de les développer et de les projeter dans l’environnement et dans le futur.
Les piliers du projet
«Je donnais tout à l’heure, explique-t-elle, l’image d’une chaise. On est entre deux chaises. Alors pour s’assoir sur la chaise, il faut quatre pieds. On a aussi quatre piliers sur lesquels repose notre projet», illustre la coordonnatrice.
Le premier, continue-t-elle, ce sont les passeurs culturels. Et c’est là qu’on utilise les parents en leur donnant des éléments historiques et des méthodes pour aller rendre cette histoire-là attrayante pour les enfants. On sait que les enfants sont intéressés par d’autres choses. Donc, comment rendre cette histoire attrayante? Comment les inviter à s’y engager? On les outille pour cela.
Le deuxième pilier, dit-elle, c’est une langue. La langue est vectrice de sagesse et de concepts, fait-elle remarquer. Elle leur ouvre d’autres perspectives, d’autres mondes et ça leur permet de se nourrir d’une langue bantoue qui véhicule également la sagesse et des informations relatives à l’Afrique.
«Le troisième pilier, c’est le club de lecture. La lecture, parce que c’est important. On y acquiert également beaucoup de sagesse. À travers elle, on parvient à découvrir la pensée africaine, des auteurs africains à partir de leurs livres. On découvre les rêves africains, de quelle manière on se projette dans ce monde-ci», déclare Mme Doumbe.
Le quatrième pilier est basé sur la culture orale. «Et on a pensé qu’il était important de transmettre également la sagesse et des méthodes de résolutions de conflits à travers l’art oratoire, le storytelling. Transmettre des histoires qui nous ont marqués à travers l’art oratoire. Les parents vont s’en servir.»
Le swahili, une langue commune
Pour l’apprentissage d’une langue commune à la plupart de Canadiens d’origine africaine, le choix du MICRO s’est porté au Swahili. «Avec la multitude de langues africaines, c’est difficile de faire un choix, mais au moins, le swahili est fédérateur dans la mesure où il est parlé dans 14 pays, par 400 millions de locuteurs sur le continent.»
Selon ses explications, il y aura beaucoup de locuteurs qui parleront cette langue ce qui en fera une langue internationale d’avenir. Les cours de swahili s’adressent d’abord aux parents et les enfants peuvent assister accessoirement.
Le MICRO se prépare à se faire enregistrer comme organisme sans but lucratif basé à Toronto. Les fondateurs espèrent avoir des membres de partout en Ontario.
Le projet Connexions culturelles est financé par le gouvernement de l’Ontario grâce à une subvention, renouvelable sur trois ans, offerte dans le cadre du Fonds Perspectives Jeunesse, un programme de la Fondation Trillium de l’Ontario. Le Fonds Perspectives Jeunesse vise à renforcer la capacité des groupes communautaires et collaborations pour améliorer le bienêtre des jeunes et des familles, avec l’accent sur les communautés autochtones et noires.